Par , publié le 12 juin 2024

Il aura fallu un peu plus d’un an, à peine, à Mistral AI pour lever près d’un milliard d’euros. Mardi, la start-up française spécialisée dans l’intelligence artificielle générative a officialisé un nouveau tour de table, le troisième déjà depuis sa création au printemps 2023. Celui-ci se chiffre à 468 millions d’euros, auxquels s’ajoute une tranche de 132 millions en dette. Selon Sifted, sa valorisation s’élève désormais à 5,8 milliards, autant que Doctolib, jusqu’à présent seul en tête du palmarès de la French Tech. Comme pour les précédentes opérations, la majorité des capitaux est apportée par des fonds de capital-risque américains. Mais Mistral “reste entièrement sous le contrôle des fondateurs”, précise son directeur général Arthur Mensch, comme pour répondre aux critiques qui ont suivi son partenariat avec Microsoft.

Ambitions mondiales – Lancée par trois anciens chercheurs de DeepMind et de FAIR, les réputés laboratoires de Google et Meta en IA, Mistral voit très grand. Son patron ne s’en cache pas: il souhaite créer un “champion européen avec des ambitions mondiales”. Pour y parvenir, la société a besoin d’énormément de liquidités. Concevoir des modèles d’IA générative nécessite en effet une immense puissance de calcul informatique, qui se traduit par des factures gigantesques – sans compter les salaires élevés des meilleurs experts dans le domaine. Moins puissante financièrement que les géants américains, Mistral assure cependant opérer à moindre coût. “Leur efficacité capitalistique est remarquable”, souligne ainsi Jeannette zu Fürstenberg, qui dirige la branche européenne du fonds General Catalyst, interrogée par le Financial Times.

Nombreux lancements – Pour attirer les investisseurs, Mistral a d’abord pu compter sur le CV de ses fondateurs. Et aussi sur son pari – au moins initial – de l’open source, un choix à contre-courant de ses rivales. Depuis, ses dirigeants peuvent également mettre en avant le travail accompli depuis un an. Malgré une petite équipe de quelques dizaines d’employés, la start-up a multiplié les lancements. D’abord, plusieurs modèles de langage de petite taille. Puis, un grand modèle en février, qui se rapproche des performances de GPT 4 d’OpenAI, le concepteur de ChatGPT, ou encore de Gemini de Google. Elle a aussi déployé un robot conversationnel, baptisé Le Chat, dont l’objectif est surtout de combler le déficit d’image face à la concurrence. Plus récemment, Mistral a dévoilé un modèle spécialisé dans le code informatique.

Modèles payants – La prochaine étape sera de construire un modèle économique pérenne. Au départ, la société avait fait le choix de l’open source, permettant d’intégrer gratuitement ses modèles dans une application. Elle espérait ensuite les monétiser avec des services payants. Cette particularité lui a permis de se démarquer des principaux acteurs du secteur, hormis Meta. Mais Mistral a fait, en partie, volte-face en début d’année. Son IA la plus performante est propriétaire: pour l’utiliser, il faut passer par des offres payantes – moins chères que celles d’OpenAI –, accessibles notamment sur les clouds de Microsoft, Amazon et Google. Et son modèle de code est gratuit pour la recherche, mais payant pour les applications commerciales. Pour accélérer, la start-up mise beaucoup sur les États-Unis, où elle vient de recruter une directrice.

Pour aller plus loin:
– Pour partir à l’assaut d’OpenAI, Mistral AI abandonne (en partie) l’open source
Le jeu trouble Cédric O, l’ex-ministre devenu lobbyiste de Mistral AI 


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