Par , publié le 31 mars 2022

Mis à mal par la pandémie, puis attaqué par de petits actionnaires en colère, The Family pensait bien avoir vécu le pire en 2020. Ce n’était au contraire que le début. Dimanche, l’incubateur devenu fonds d’investissement a révélé avoir porté plainte pour abus de confiance, faux et usage de faux contre Oussama Ammar, l’un de ses trois fondateurs. Il a aussi lancé plusieurs procédures pour geler ses actifs, notamment en France et aux îles Caïmans. Il lui reproche d’avoir détourné trois millions d’euros, qui auraient dû être investis dans plusieurs start-up américaines. “Une trahison”, regrette Alice Zagury, la directrice générale de The Family. “Un différend légal entre associés sur fond de ressentiment personnel”, rétorque son ancien associé, déjà condamné en 2018 pour abus de confiance.

Le gourou – Créé en 2013, peu avant le lancement de l’initiative French Tech, The Family détonne par ses formules chocs, sa communication, la starification de ses fondateurs… Le nouveau venu en agace certains. Mais ses locaux parisiens deviennent rapidement un lieu incontournable pour une partie de la start-up nation. On y vient voir de prestigieux invités, comme Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie, ou Sheryl Sandberg, la numéro deux de Facebook. Mais surtout écouter les interventions d’Oussama Ammar, ou suivre ses formations. L’entrepreneur est le visage de The Family. Au fil des ans, il est même devenu une marque, sur laquelle capitalise la société. Et un gourou pour certains, prêts récemment à payer plusieurs milliers d’euros pour participer à un dîner en sa présence.

Les petites combines – Derrière cette façade, se cache une gigantesque imbrication de filiales et de véhicules d’investissement. Une gouvernance opaque où les actifs passent d’une société à l’autre. Et où l’on accorde des prêts à des holdings des fondateurs à Hong-Kong. Depuis son lancement, The Family a multiplié les prises de participation, d’abord dans les start-up françaises qu’il accompagnait. Puis dans des jeunes pousses américaines. Pour certains de ces investissements, l’incubateur a eu recours à des holdings personnelles d’Oussama Ammar. Les premières difficultés apparaissent avec la crise sanitaire, lorsque la société est obligée d’arrêter ses lucratives formations et doit fermer son siège parisien. Les pertes s’accumulent. Et les actionnaires commencent à réclamer des comptes.

L’escroquerie ? – Dans ces épreuves, les trois cofondateurs de The Family font alors front commun. Un an plus tard, ils s’affrontent par avocats interposés. Entretemps, Oussama Ammar avait annoncé son départ. Une démission, expliquait-il fin novembre. Une mise à la porte, assure aujourd’hui Alice Zagury. Le détournement de fonds aurait eu lieu entre décembre 2019 et octobre 2020. Sur cette période, The Family recueille trois millions d’euros auprès d’investisseurs, afin d’entrer dans le capital de plusieurs groupes américains, dont Stripe. Oussama Ammar est alors à la manœuvre, mais The Family assure aujourd’hui n’avoir aucune preuve que ces opérations ont bien eu lieu. “Avions-nous la gouvernance adaptée ?, se demande Alice Zagury. Entre dirigeants, nous nous faisions confiance”.


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