Par , publié le 18 octobre 2022

C’est une première qui fera certainement date pour les géants tech américains. Après avoir épuisé toutes les voies de recours, Facebook a confirmé mardi qu’il allait bien revendre Giphy, la plateforme de création et d’échange de GIF animés achetée en 2020 pour un montant estimé à 400 millions de dollars. Cette acquisition était contestée par l’autorité de la concurrence britannique (CMA), qui estimait qu’elle “aurait réduit la concurrence entre les plateformes sociales”. La société américaine avait fait appel devant la justice, sans succès. Elle va désormais devoir trouver un acheteur. En position de faiblesse, elle aura bien du mal à limiter la moins-value.

Rival potentiel – Dans son rapport publié l’an passé, la CMA soulignait d’abord que Giphy aurait pu devenir un acteur important de la publicité sur les réseaux sociaux. Avant d’être rachetée, la start-up vendait en effet des GIF sponsorisés à des entreprises aux Etats-Unis. Et elle avait pour projet d’étendre ce programme à d’autres marchés. Son acquisition aurait ainsi permis à Facebook d’empêcher l’émergence d’un potentiel concurrent, qui aurait pu limiter sa position dominante. Le gendarme notait également que Giphy est la plateforme de GIF la plus populaire. Il redoutait donc que sa librairie ne soit, à terme, plus accessible à TikTok, Snapchat ou Twitter. Ou que Facebook leur impose de partager davantage de données sur leurs utilisateurs.

Le précédent Instagram – La décision de la CMA est historique. D’abord, parce que c’est la première fois qu’un régulateur impose à un géant de la Silicon Valley de revenir sur une acquisition déjà bouclée. Ensuite, parce que le rachat de Giphy aurait certainement obtenu très facilement un feu vert il y a encore quelques années. La plateforme de GIF n’est en effet pas un concurrent direct de Facebook. Et son rachat ne change pas vraiment les positions sur le marché. C’est cette logique qui avait permis au réseau social de mettre la main sur Instagram en 2012, puis sur WhatsApp en 2014. Des décisions qui hantent désormais les autorités de la concurrence, accusées d’avoir favorisé l’émergence d’un mastodonte.

Effet pervers ? – À Londres, mais aussi à Bruxelles et à Washington, les gendarmes antitrust ont donc changé d’approche, estimant que la précédente n’est plus adaptée. Ils souhaitent, par exemple, examiner systématiquement les acquisitions menées par les grands groupes technologiques, alors que les petites opérations ne nécessitent pas pour le moment d’autorisation. Ils souhaitent aussi restreindre les “killer acquisitions”, qui visent uniquement à mettre la main sur un potentiel rival avant qu’il ne devienne trop menaçant. Cette nouvelle philosophie pourrait cependant présenter un effet pervers: pour certaines start-up, un rachat représente le meilleur, voire le seul, exit possible.

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