Par , publié le 11 mars 2023

La chute a pris moins de 48 heures. Vendredi, les régulateurs bancaires américains ont fermé et pris immédiatement le contrôle de Silicon Valley Bank, la banque préférée des start-up et des fonds de capital-risque de la région. Cette institution, créée il y a près de 40 ans, a succombé à une véritable ruée bancaire, déclenchée mercredi soir par l’annonce inattendue d’une augmentation de capital. En quelques heures, ses clients ont tenté de retirer 42 milliards de dollars. Et la banque s’est retrouvée dans l’incapacité d’honorer toutes ces demandes. Les nombreuses start-up – probablement plusieurs milliers – qui n’ont pas pu récupérer leurs fonds à temps risquent désormais de subir de très lourdes pertes. Et de se retrouver très vite dans l’incapacité de payer leurs salaires ou leurs factures.

35.000 start-up clientes – Basée à Santa Clara, en plein cœur de la Silicon Valley, SVB est devenue un acteur incontournable dans l’écosystème technologique américain. En combinant activités bancaires classiques, services destinés aux fondateurs et prêts dits “venture”, elle séduit environ la moitié des start-up du pays. Elles y ont déposé les fonds levés auprès d’investisseurs ou contracté des prêts pour financer leur croissance. Certaines sociétés cotées, comme Shopify, Pinterest et Roku, font toujours partie de ses clients. SVB avait étendu son activité au Royaume-Uni, en Allemagne ou encore en Chine. L’envolée des levées de fonds après la crise sanitaire l’a fait grossir très rapidement. En deux ans, les dépôts de ses clients ont triplé, pour frôler la barre des 200 milliards de dollars.

Retrait des dépôts – Comme d’autres banques, SVB est pénalisée par la forte hausse des taux d’intérêt, provoquée par le resserrement des politiques monétaires pour lutter contre l’inflation. Ses déboires ont été accentués par la chute des levées de fonds pour les start-up, qui s’est traduite par un repli des sommes déposées sur les comptes de ses clients. Mercredi, pour doper ses liquidités, l’établissement a annoncé une augmentation de capital de 2,25 milliards de dollars. Une décision qui a suscité des craintes, a priori non justifiées, sur sa situation financière, faisant chuter son action de 60% à Wall Street. Dans la foulée, plusieurs grands fonds de capital-risque ont recommandé aux start-up de leur portefeuille de retirer le plus rapidement possible leur argent de la banque… précipitant sa chute brutale.

250.000 dollars de garantie – Avant son effondrement, SVB cumulait plus de 175 milliards de dollars de dépôts. Autrement dit: au moins 130 milliards sont aujourd’hui inaccessibles. Lundi, les clients de l’établissement recevront chacun 250.000 dollars, la garantie maximale de l’assurance sur les dépôts aux États-Unis. Ils percevront ensuite progressivement des dividendes, en fonction de la liquidation des actifs par la FDIC, l’agence gouvernementale qui a pris le contrôle de SVB. Selon Bloomberg, cette dernière tente d’agir au plus vite. Elle espère ainsi reverser entre 30% et 50% des dépôts cette semaine. À terme, il est très probable que les clients de SVB perdront une partie de leur argent. L’agence Moody’s prédit qu’ils récupéreront entre 80% et 90% des fonds qui n’étaient pas garantis.

Payer les salaires – En attendant, de nombreuses start-up n’ont plus accès à leur trésorerie – les sommes qu’elles ont levées ou que SVB leur a prêtées. Beaucoup de dirigeants se demandent comment ils pourront verser les salaires cette semaine. Janet Yellen, la secrétaire au Trésor, a exclu de renflouer la banque, tout en se disant prête à aider ses clients. Sans donner plus de précisions… Pour assurer leur fonctionnement, des start-up cherchent à contracter des prêts relais. La banque en ligne Brex assure avoir reçu pour un milliard de dollars de demandes. Des hedge funds proposent de racheter les dépôts à prix cassé – entre 60% et 80% de leur valeur, selon Semafor. Enfin, certains fonds de capital-risque ont aussi offert leur aide. Mais d’autres avaient placé leurs liquidités chez… SVB.

Pour aller plus loin:
– Forte baisse des levées de fonds pour les start-up
Plus de 100.000 licenciements dans la tech en 2022


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