Par , publié le 9 mai 2023

Face à la menace, Google bouscule ses habitudes. Après avoir fusionné ses deux laboratoires de recherche en intelligence artificielle, le groupe de Mountain View met également un terme à son modèle de recherche ouverte dans le domaine. Selon des informations du Washington Post, confirmées par Business Insider, il a en effet décidé de limiter la publication d’articles scientifiques par ses chercheurs en IA. Avant de partager ses dernières avancées technologiques, Google souhaite désormais d’abord les transformer en produits commerciaux. Un changement majeur, symbole d’une nouvelle réalité provoquée par l’immense succès du robot conversationnel ChatGPT. “L’heure est maintenant à la compétition, en gardant nos connaissances en interne”, résume un chercheur de l’entreprise.

Centaines d’articles – Le moteur de recherche avait toujours vanté les vertus de cette pratique, dès ses premiers travaux dans l’apprentissage automatique au début des années 2010. Facebook avait suivi la même voie. Et même Apple, pourtant longtemps réticent. Ces dernières années, Google a ainsi publié plusieurs centaines d’articles scientifiques majeurs dans le domaine de l’intelligence artificielle. Cette stratégie permettait d’abord de séduire les meilleurs chercheurs, en leur permettant de continuer à participer au champ académique. Elle lui servait aussi à se montrer attractif envers les jeunes diplômés, souhaitant travailler dans les entreprises les plus avancées. Enfin, la société estimait que la collaboration académique permettait de faire progresser l’IA dans son ensemble, ce qui finirait par lui profiter.

Menace directe – Mais l’émergence de l’intelligence artificielle générative, capable de créer des textes, des photos ou encore des chansons, a changé la donne. Précédemment, l’apprentissage automatique servait essentiellement à améliorer des produits déjà existants. Il ne remettait pas en cause les positions déjà établies, quand il ne contribuait pas au contraire à les renforcer. L’IA générative marque une rupture beaucoup plus radicale car elle débouche sur la création de nouveaux services, susceptibles, eux, de faire bouger les lignes. Les grands modèles de langage, alimentant les robots conversationnels comme ChatGPT, représentent potentiellement une menace directe sur la position dominante de Google dans la recherche en ligne. Et donc sur ses gigantesques profits.

“Code rouge” – Ses dirigeants ne prennent pas ce risque à la légère. Fin 2022, ils ont ainsi déclenché un “code rouge”, qui s’est traduit par le rapprochement entre les laboratoires Brain et DeepMind. Et aussi par la volonté de déployer plus rapidement l’IA générative dans les produits. La fin du modèle de recherche ouverte s’inscrit dans cette démarche. Le groupe souhaite éviter que ses investissements en recherche fondamentale aident de nouveaux acteurs à l’attaquer. Google en a déjà fait l’expérience. Ses travaux sur le modèle de réseau de neurones Transformer, publiés en 2017, ont en effet joué un rôle primordial dans l’émergence de GPT, le grand modèle de langage développé par la start-up OpenAI, sur lequel s’appuient ChatGPT et le chabot intégré à Bing, le moteur de recherche de Microsoft.

Pour aller plus loin:
ChatGPT fait perdre plus de 500 millions de dollars à OpenAI
– Après le succès de ChatGPT, les investisseurs se ruent sur l’IA


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