En annonçant la semaine dernière, en ouverture de sa grande conférence annuelle I/O, le lancement de son robot conversationnel Bard dans 180 pays, Google s’est bien gardé de préciser un détail important: le rival de ChatGPT ne sera pas disponible dans tous les pays de l’Union européenne – et aussi au Canada. “Nous travaillons en étroite collaboration avec des experts et des décideurs politiques pour nous assurer que Bard soit en ligne avec les exigences locales. Nous le déploierons ensuite dans plus de pays”, explique une porte-parole du moteur de recherche. Autrement dit: Google souhaite d’abord s’assurer que son service dopé à l’intelligence artificielle générative respecte bien les contraintes du Règlement général sur la protection des données (RGPD), avant de le lancer sur le continent.
Éviter une amende – Cette prudence s’explique probablement par les déboires rencontrés en Europe par OpenAI, le concepteur de ChatGPT. Fin mars, le chatbot avait été bloqué en Italie, en raison de “l’absence de base légale” justifiant la collecte de données. L’accès a été rétabli depuis, mais l’enquête se poursuit. En France, au moins trois plaintes ont été déposées auprès de la Cnil. Et une task force a été lancée par l’organisation regroupant l’ensemble des régulateurs européens. Parallèlement, de nouvelles règles sont en discussion à Bruxelles, qui obligeront notamment les services d’IA générative à déclarer si des contenus protégés par le droit d’auteur ont été utilisés pour entraîner leur modèle. En retardant le lancement de Bard, Google se met l’abri d’une potentielle amende pouvant atteindre 4% de son chiffre d’affaires.
Accélération – Pris de court par l’immense succès de ChatGPT, Google appuie désormais sur l’accélérateur. En plus du déploiement dans 180 pays, Bard est maintenant accessible à tous les internautes, alors qu’il était jusqu’à présent réservé à un petit nombre d’utilisateurs. Le robot conversationnel est par ailleurs disponible en japonais et en coréen, en plus de l’anglais. Et 40 langues supplémentaires seront ajoutées “prochainement”. Bard pourra également bientôt intégrer des images à ses réponses, et aussi analyser des images incluses dans les requêtes. La plateforme va s’enrichir d’intégrations avec d’autres services de Google comme Maps et Google Docs. Adobe, Spotify, Uber Eats, Tripadvisor ou encore OpenTable proposeront également des extensions.
Moteur de recherche – La riposte de Google passe aussi par un nouveau grand modèle de langage, appelé PaLM 2, qui offre “des capacités améliorées en matière de logique, de raisonnement et de mathématiques”. Et la société travaille toujours sur l’intégration de l’IA générative à son moteur de recherche. Elle a dévoilé de premières “expériences”, disponibles en phase de tests aux Etats-Unis. Elle refuse cependant toujours de communiquer une date pour un lancement à plus grande échelle, optant là aussi pour une approche prudente, notamment en raison d’erreurs factuelles. Google promet aussi d’ajouter une couche d’IA générative à ses autres produits. Comme un symbole de cette nouvelle réalité, quasiment l’intégralité de la conférence d’ouverture d’I/O y était consacrée.
Pour aller plus loin:
– Google combine ses laboratoires de recherche en IA
– Google change de philosophie dans la recherche en IA