Par , publié le 7 octobre 2024

Il y a quelques mois, Inflection AI, Character AI et Adept AI faisaient partie des start-up les plus prometteuses de l’intelligence artificielle générative, levant en tout deux milliards de dollars. Elles ne sont aujourd’hui plus que l’ombre d’elles-mêmes, dépecées respectivement par Microsoft, Google et Amazon, devenant le symbole d’une nouvelle réalité. Elles ne disposaient plus des moyens financiers pour faire face aux immenses coûts d’entraînement et d’inférence des modèles d’IA. Et leurs investisseurs ont surtout cherché à limiter la casse avant qu’il ne soit trop tard. Les trois start-up ont ainsi dû se résoudre à laisser partir une grande partie de leurs équipes en échange d’un joli chèque, dans le cadre d’opérations qui ressemblent à des acquisitions déguisées. Elles vivotent désormais bien loin de leurs ambitions initiales.

Microsoft en pionnier – La voie a été ouverte par Microsoft. En mars, le groupe de Redmond a avalé Inflection, connue pour Pi, un chatbot rival de ChatGPT. Cet accord lui a permis de récupérer une grande partie des ingénieurs de la start-up, dont son patron Mustafa Suleyman, l’un des fondateurs de DeepMind, le laboratoire d’IA racheté en 2014 par Google. Fin juin, Amazon a emboîté le pas, recrutant environ deux tiers des effectifs d’Adept, qui développait des “coéquipiers IA” permettant d’effectuer très facilement des actions dans les logiciels. Début août, Google a fait la même chose avec Character, une plateforme de chatbots imitant des personnalités. Cette opération lui a permis de réembaucher Noam Shazeer, un ancien de la maison qui avait participé aux travaux de recherche à l’origine de l’essor de l’IA générative.

Antitrust – Dans un autre contexte, les trois géants auraient simplement mené des acquisitions. Mais ce type d’opération semble compliqué à mener, alors que les autorités antitrust ont haussé le ton face à leur position dominante. Dans le meilleur des cas, un rachat aurait pris de longs mois, voire plusieurs années, avant d’être validé. Un délai beaucoup trop long sur un secteur qui avance à toute vitesse. À la place, Microsoft, Google et Amazon ont opté pour ces montages financiers, qui incluent aussi des accords de licence, leur permettant de distribuer les modèles des trois start-up. Leur montant semble complètement déconnecté de la réalité du marché: 2,7 milliards pour Character, 650 millions pour Infection et 440 millions pour Adept. Si les régulateurs se penchent sur ces accords, aucune procédure n’a encore été lancée.

Que le début ? – L’avenir des trois start-up est aujourd’hui incertain. Non seulement, elles ont perdu leurs forces vives – leurs fondateurs et leurs meilleurs ingénieurs. Mais presque l’intégralité de la somme reçue est allée dans les poches de leurs investisseurs. Autrement dit: si elles existent toujours, elles ne semblent plus avoir les moyens, ni humains ni financiers, de survivre bien longtemps. En attendant, elles ont dû recentrer leurs efforts. Inflection a renoncé à son chatbot grand public. Character a abandonné ses propres modèles. Et Adept se focalise sur des applications plus concrètes. Compte tenu de la bulle autour de l’IA, ce genre d’opérations pourrait se poursuivre, se substituant aux traditionnelles “aqui-hire” (une acquisition visant seulement à recruter des équipes). Et créant de nouvelles start-up zombies.

Pour aller plus loin:
– Comment la course aux profits s’est imposée dans l’IA
– Après l’euphorie, les craintes d’une bulle autour de l’IA


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