Par , publié le 17 octobre 2024

Quand Lucian Grainge veut quelque chose, généralement, il finit par l’obtenir. À la tête d’Universal Music, la première maison de disques mondiale, le Britannique est considéré comme la personnalité la plus puissante du monde de la musique. Une influence qu’il compte bien mettre à profit pour imposer une nouvelle feuille de route pour le streaming musical. Avec un seul objectif: maintenir la trajectoire de croissance des recettes du secteur, tirée depuis une dizaine d’années par le succès des offres payantes. Celle-ci pourrait en effet être menacée par la maturité de certains marchés occidentaux, sur lesquels il est plus difficile d’attirer de nouveaux abonnés. Sa solution: monétiser davantage les “superfans” en leur vendant une nouvelle offre plus chère. Un tournant que s’apprête d’ailleurs à prendre Spotify.

Streaming 2.0 – Le dirigeant d’Universal ne conteste pas que le streaming a rempli sa mission initiale: sauver une industrie, plombée par le piratage, qui avait vu ses revenus être divisés par deux en dix ans. Il estime cependant qu’il faut entrer dans une phase “2.0”. La première a été consacrée à une double transition: d’abord vers les plateformes légales financées par la publicité, puis vers les offres payantes. Selon les estimations du cabinet Midia, plus de 700 millions de personnes ont souscrit à un abonnement. Mais le taux de croissance commence à ralentir dans certains pays occidentaux, ceux qui rapportent le plus. Aux États-Unis, les plateformes n’ont gagné que 5 millions d’abonnés en 2023, le plus faible chiffre historique. En France, le marché subit un “tassement”, malgré un taux de pénétration assez faible.

Hausse des prix – Surtout, souligne Lucian Grainge, la musique reste “sous-monétisée”. Les dépenses musicales moyennes des consommateurs ne représentent en effet, une fois ajustées de l’inflation, que la moitié de leur pic touché en 1999. Pour augmenter le revenu par utilisateur, les maisons de disques ont poussé les services de streaming à procéder à des hausses de prix, revenant sur leur tarif historique de dix dollars ou euros par mois. Tous les acteurs se sont engagés sur cette voie, qu’ils comptent poursuivre. Pas suffisant pour le patron d’Universal, qui touche un pourcentage sur chaque abonnement. Il souhaite maintenant s’attaquer aux “superfans”. Son constat est simple: ces passionnés de musique ne paient pas plus que les autres. Avant l’avènement du streaming, ils dépensaient trois fois plus que le consommateur moyen.

Offre “super premium” – Selon Universal, un quart des abonnés sont prêts à payer davantage pour bénéficier d’une meilleure expérience d’écoute. C’est ce que devrait bientôt leur proposer Spotify avec une offre “super premium”. Selon Bloomberg, celle-ci sera vendue cinq dollars de plus par mois. Elle proposera de nouveaux outils pour créer des playlists ou gérer sa librairie. Et surtout une qualité de son haute-fidélité – une option aujourd’hui proposée gratuitement par Apple ou Amazon, pour le moment du moins. Lucian Grainge souhaite aussi fournir à ces fans “des expériences et un accès qui les rapprochent des artistes qu’ils aiment”. Un exemple pourrait venir de Chine, où Tencent vend un abonnement VIP cinq fois plus cher que l’offre de base, en proposant un accès prioritaire aux nouvelles chansons et aux places de concert.

Pour aller plus loin:
– Pourquoi l’industrie du disque accuse Spotify de “trahison”
– Face à l’IA, l’industrie du disque ne sait pas sur quel pied danser


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