Par , publié le 7 novembre 2024

Un dernier coup d’éclat pour Margrethe Vestager ? Avant de céder son poste de commissaire européenne à la concurrence, qu’elle a occupé pendant dix ans, l’emblématique responsable danoise s’apprête à infliger une amende à Apple, rapportent Bloomberg et Reuters. Le groupe à la pomme deviendrait alors la première entreprise sanctionnée dans le cadre du Digital Markets Act européen, une nouvelle réglementation visant à renforcer la concurrence dans le numérique. Bruxelles lui reproche les mesures mises en place pour respecter l’interdiction de la pratique d’anti-steering. Celle-ci empêche les développeurs d’application mobiles de rediriger leurs utilisateurs vers un site Internet afin de réaliser un achat ou souscrire à un abonnement. Apple risque une amende pouvant atteindre 10% de son chiffre d’affaires mondial.

Tester les limites – En vigueur depuis mars, le DMA marque une rupture historique pour les autorités antitrust, essayant d’agir a priori plutôt qu’a posteriori pour lutter contre des pratiques anticoncurrentielles. Le texte ne fixe que de grands principes, sans mentionner de règles précises. Il laisse ainsi une marge de manœuvre aux “contrôleurs d’accès” pour décider des mesures à mettre en place. Logiquement, ceux-ci ont cherché à ne modifier que le strict nécessaire, testant les limites du texte, mais aussi la détermination de Bruxelles. Sur le papier, le groupe de Cupertino a bien renoncé à l’anti-steering. Les applications ont désormais le droit d’intégrer des liens pour rediriger leurs utilisateurs. Et ainsi ne plus passer par son système de paiement. Mais la Commission estime qu’il impose des restrictions trop importantes.

Commissions – Par exemple, Apple n’autorise pas les développeurs à indiquer les prix pratiqués sur leur site pour mettre en avant de potentielles économies. Il leur interdit aussi de faire librement la promotion de leurs offres externes. Bruxelles lui reproche par ailleurs de continuer à prélever des commissions (avec un taux abaissé de 3 points, couvrant à peine les frais bancaires additionnels) sur les achats réalisés hors des applications. Un prélèvement qui va “au-delà de ce qui est strictement nécessaire”. Pour éviter une sanction, le concepteur de l’iPhone aurait pu soumettre des concessions. Mais ses dirigeants ne semblaient pas disposés à le faire. Par principe, peut-être. Mais surtout pour tenter de préserver les gigantesques commissions prélevées sur les achats et les abonnements, qui affichent des marges proches de 100%.

Astreinte – Il est donc probable qu’Apple décide de contester son amende devant la justice européenne, s’engouffrant dans les failles du DMA pour arguer qu’il respecte le texte à la lettre. Une procédure qui pourrait repousser de plusieurs années la mise en place des changements souhaités. Pour forcer le groupe à réagir rapidement, Bruxelles pourrait cependant lui infliger des astreintes journalières, faisant gonfler la facture plus le statu quo persiste. Cette première sanction fait suite à une amende de 1,8 milliard d’euros infligée dans une affaire similaire, limité au streaming musical. Surtout, elle pourrait être suivie par d’autres condamnations. La Commission a notamment ouvert une enquête sur un dossier encore plus explosif: les boutiques tierces d’applications. Et la nouvelle structure de commissions instaurée par Apple.

Pour aller plus loin:
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– Face aux géants du numérique, le DMA inspire de nombreux pays


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