En rachetant Qwant, Octave Klaba s’est lancé dans un immense défi: sauver une entreprise au bord du gouffre financier et en panne cruelle d’innovation. Le fondateur d’OVHcloud vient de trouver un allié pour y parvenir. Mardi, le moteur de recherche français a annoncé la création d’une coentreprise avec son rival allemand Ecosia, connu pour utiliser ses profits pour planter des arbres. Ensemble, ils souhaitent bâtir un index de recherche, répertoriant des centaines de millions de pages Internet. Une étape essentielle qui doit leur permettre de s’affranchir peu à peu des technologies de Microsoft et de Google. Et qui, espèrent-ils, leur permettra d’offrir une meilleure expérience utilisateur. “Nous ne cherchons pas à créer une révolution. Juste proposer une alternative dans ce monde qui en manque”, explique Octave Klaba.
D’abord en français – Cette coentreprise, baptisée European Search Perspective, s’inscrit dans la feuille de route établie par l’entrepreneur. Depuis le rachat, Qwant a en effet accéléré ses efforts pour construire son propre index. Celui-ci est d’ailleurs bientôt prêt: une version alpha, encore “perfectible”, sera lancée dans les “prochains jours”. En s’associant avec Ecosia, la société va pouvoir “accélérer”, promet Octave Klaba. Le moteur allemand, en bien meilleure santé financière, va en effet apporter des liquidités pour poursuivre ces travaux. Les équipes d’ingénieurs et de data scientists de Qwant rejoindront ainsi la nouvelle structure. L’index doit être lancé au premier semestre 2025, d’abord en français puis progressivement en allemand. Une version anglaise pourrait suivre, avant potentiellement d’autres langues.
Résultats de Bing – Dès son lancement en 2013, Qwant avait promis de bâtir son propre index, afin de proposer, expliquaient alors ses dirigeants, une alternative souveraine et respectueuse de la vie privée aux géants américains du secteur. Mais cette promesse ne s’est jamais matérialisée, par manque d’argent mais aussi de compétences. Et le “Google français” s’appuyait ainsi sur les résultats fournis par Bing, le moteur de Microsoft. L’intérêt d’Ecosia est plus récent. Il est probablement économique. L’an passé, Microsoft a en effet fortement augmenté les tarifs pour utiliser l’index de Bing. Le groupe allemand a alors basculé en partie vers Google, dont les prix sont plus abordables. Mais cette solution ne résout qu’une partie du problème, car le géant de Mountain View ne permet pas d’utiliser son index sur une application mobile.
0,3% du marché – Ce contexte pourrait d’ailleurs être favorable aux deux partenaires, qui souhaitent proposer leur index à d’autres moteurs touchés par cette hausse des prix. Cela pourrait leur permettre de dégager des ressources additionnelles, à condition toutefois d’offrir une alternative suffisamment solide. Avec leur propre index, Ecosia et Qwant espèrent suivre la même voie que le moteur sud-coréen Naver, qui vient de supplanter Google dans le pays. Ils partent cependant de très loin. Le premier affiche une part de marché de 0,3% en Europe, selon les estimations de Statcounter. Le second est encore plus bas. Pas de quoi décourager Octave Klaba, qui a insufflé de la vie dans une entreprise au bord du dépôt de bilan. Le moteur prépare déjà l’avenir. Au printemps, il a ainsi déployé des réponses rédigées par l’IA générative
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