Par , publié le 28 novembre 2024

Les adolescents australiens n’auront bientôt plus le droit d’utiliser TikTok, Instagram et même YouTube. Jeudi, le Sénat doit en effet définitivement adopter un projet de loi, déjà voté mercredi à une large majorité par la Chambre des représentants, qui interdit les plateformes sociales aux moins de 16 ans. “Les réseaux sociaux font beaucoup de mal aux enfants”, justifie le premier ministre Anthony Albanese, soutenu dans cette initiative par les deux principaux partis politiques du pays. Ce texte est l’un des plus stricts jamais instaurés. Il ne prévoit aucune exception, même en cas d’accord parental. Son entrée en vigueur est prévue dans un an, mais une question majeure reste encore en suspens: comment vérifier l’âge des utilisateurs ? De quoi laisser planer beaucoup de doutes sur sa réelle efficacité.

Aucun contrôle – Sur le papier, presque tous les réseaux sociaux n’autorisent pas les inscriptions avant 13 ans. Cet âge ne doit rien au hasard: il correspond à une législation américaine qui interdit de collecter les données personnelles des enfants sans le consentement des parents. Dans les faits, cependant, il n’y a aucun contrôle. Et il suffit simplement de renseigner une fausse date de naissance pour contourner cette restriction. En France, 63% des moins de 13 ans ont ainsi au moins un compte sur un réseau social, selon une enquête de la Cnil. Le débat autour de l’utilisation de ces plateformes par les enfants et les adolescents n’est pas nouveau. Dans une étude interne, révélée il y a trois ans par la lanceuse d’alerte Frances Haugen, Meta reconnaissait d’ailleurs les effets dévastateurs d’Instagram chez certains jeunes.

Pas de sanctions – Pourtant, peu de réglementations ont été mises en place. L’an passé, la France a bien voté un texte instaurant la nécessité d’un accord parental pour s’inscrire avant 15 ans. Mais l’obligation de contrôle n’est pas encore entrée en vigueur. Aux États-Unis, plusieurs États ont voulu instaurer des interdictions, mais ils se sont heurtés à des décisions judiciaires défavorables. La nouvelle loi australienne prévoit la fermeture de tous les comptes déjà ouverts par les moins de 16 ans. Il n’y aura cependant pas de sanctions contre les adolescents qui contourneront l’interdiction et contre leurs parents. “La responsabilité incombera aux réseaux sociaux de démontrer qu’ils prennent des mesures raisonnables pour empêcher l’accès”, explique Anthony Albanese. Sous peine d’amende pouvant aller jusqu’à 30 millions d’euros.

Quels contrôles ? – Le texte a suscité de vives critiques. Dans une lettre ouverte, une centaine d’experts de l’enfance regrettent que les moins de 16 ans ne puissent plus utiliser des plateformes de socialisation et d’accès à l’information. Si les entreprises concernées assurent qu’elles respecteront la loi, elles regrettent une adoption “précipitée”, avant même que les résultats des tests menés sur les outils de contrôle de l’âge. Plusieurs pistes ont été évoquées, comme la vérification d’une pièce d’identité ou l’utilisation de données biométriques par l’intermédiaire de tiers de confiance. Mais celles-ci soulèvent des interrogations majeures sur la protection de la vie privée. “Aucun pays dans le monde n’a résolu ce problème”, reconnaît d’ailleurs le gouvernement australien dans une note interne obtenue par The Guardian.

Pour aller plus loin:
– Facebook suspend sa version pour enfants d’Instagram
– La lanceuse d’alerte Frances Haugen exhorte l’Europe à agir


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