Avec l’éditeur de logiciels Planisware au printemps puis, plus modestement, le spécialiste de l’intelligence artificielle générative LightOn en novembre, l’année aura été très calme pour les introductions en Bourse (IPO) de sociétés technologiques françaises. Une nouvelle fois. Mais après “trois années creuses”, Mathieu Caron anticipe désormais des jours meilleurs. “Le pipeline est très encourageant”, souligne le responsable des marchés primaires d’Euronext, qui gère sept places boursières en Europe, dont celle de Paris. Deux éléments incitent à l’optimisme. D’abord, un contexte plus favorable, avec une baisse des taux directeurs et les performances solides des indices boursiers, notamment le Nasdaq. Ensuite, la nécessité pour les start-up ayant levé des fonds en 2020 ou 2021 d’offrir une sortie à leurs investisseurs.
Loin des objectifs – Pour la tech française, les introductions en Bourse représentent le prochain palier à passer. Dix ans après le lancement de la Mission French Tech, le nombre d’opérations d’envergure se compte toujours sur les doigts d’une seule main. Et les groupes qui ont franchi le pas, comme OVHcloud, Deezer ou Believe, connaissent un parcours bien difficile. Les objectifs gouvernementaux – “10 licornes cotées d’ici 2025” – se sont ainsi fracassés sur la réalité du marché français, peu enclin à financer des sociétés, pas ou peu rentables, aux valorisations artificiellement gonflées par l’euphorie post-Covid. Paradoxalement, la fin de cette période d’argent facile pourrait représenter un atout en vue d’une vague d’IPO: elle a obligé les start-up à changer de logiciel, délaissant l’hypercroissance au profit de la rentabilité.
Tentation américaine – La Bourse de Paris espère capitaliser sur ce nouveau cycle. Mais la tentation new-yorkaise sera certainement grande pour certains candidats, notamment pour les sociétés qui réalisent une part importante de leur activité aux États-Unis. Au-delà du prestige, être coté sur le Nasdaq ou sur le New York Stock Exchange renforcera bien davantage leur crédibilité auprès de potentiels clients et partenaires. Surtout, les marchés américains pourraient leur permettre d’obtenir des conditions d’introduction plus avantageuses. “Les investisseurs américains, notamment le grand public, ont un appétit plus fort pour les entreprises risquées, comme la tech”, reconnaît Sébastien d’Herbès, qui gère les IPO chez Euronext. “Mais les entreprises européennes qui ont choisi de se coter aux États-Unis sont généralement déçues”, assure-t-il.
Fonds publics – “Les marchés américains, ce n’est pas pour tout le monde”, abonde Mathieu Caron, en particulier pour les sociétés capitalisées à moins de dix milliards de dollars, noyées parmi tant d’autres. Une cotation européenne offre, en outre, des coûts moins élevés et un accès plus facile à un indice – ce qui soutient mécaniquement le cours. Pour séduire les start-up, Euronext a lancé un programme d’accompagnement. L’opérateur a proposé aux autorités de simplifier le processus d’introduction. Et il a créé un nouvel indice regroupant les valeurs tech européennes, sur lequel pourront être adossés des produits dérivés. Euronext s’est aussi assuré du soutien de la Caisse de dépôts et de Bpifrance, qui se sont engagés à injecter deux milliards d’euros pour servir d’investisseurs “cornerstone”, devant assurer le succès des IPO.
Pour aller plus loin:
– En Europe, la reprise des levées de fonds se fait toujours attendre
– Douche froide pour la reprise des IPO technologiques