Par , publié le 8 janvier 2025

L’IA générative en quête de modèle – Deux ans après le spectaculaire lancement de ChatGPT, l’intelligence artificielle générative ne cesse de progresser. Cependant, la technologie peine toujours à trouver son modèle économique, alors que le déploiement dans les entreprises est bien moins rapide qu’espéré. Certes, certains cas d’usage ont fait leurs preuves, notamment dans le service client. Mais beaucoup de projets ne dépassent pas le stade de PoC (preuve de concept). Et les assistants d’IA, comme Copilot de Microsoft, ne justifient pas leur prix élevé. Sans compter que l’essentiel du marché est capté par les versions payantes de ChatGPT. Dans ce contexte, les acteurs du secteur parient désormais sur les agents d’IA, capables d’automatiser certaines tâches complexes sans intervention humaine. Et donc de procurer des gains de productivité plus importants pour les entreprises. En attendant ces débouchés commerciaux, les coûts de développement s’accumulent. De nombreuses start-up éprouvent ainsi des difficultés financières, les obligeant à accepter des rachats déguisés par des géants de la tech ou à revoir leurs ambitions à la baisse.

L’hégémonie de Google sous la menace – Au lancement de ChatGPT, certains observateurs prédisaient déjà la mort de Google. Deux ans plus tard, le géant américain de la recherche en ligne souffre encore peu. Mais la menace s’est nettement accentuée avec les avancées de la start-up Perplexity AI. Et surtout avec l’intégration d’une véritable fonctionnalité de recherche au sein de ChatGPT. Celle-ci permet au robot conversationnel d’OpenAI d’aller trouver des informations sur Internet pour les combiner avec la puissance de l’intelligence artificielle générative. Et ainsi de remplacer les traditionnels liens ou petits extraits de sites Internet par des réponses plus complexes et détaillées. Une nouvelle expérience utilisateur qui pourrait remettre en cause la domination écrasante de Google, qui s’accapare plus de 90% des recherches traditionnelles, selon StatCounter. Le groupe de Mountain View a bien compris le danger: il a ajouté, non sans péripéties, des réponses générées par son modèle Gemini sur la page de résultats. Ce module doit proposer le meilleur des deux mondes: des réponses classiques et des réponses alimentées par l’IA.

Intel à la croisée des chemins – Moins de quatre ans après le lancement d’un ambitieux plan de relance, Intel va repartir d’une feuille blanche. En décembre, son directeur général Pat Gelsinger a été poussé à la retraite anticipée par le conseil d’administration. Un départ abrupt qui concrétisait l’échec de la feuille de route du géant américain des semi-conducteurs. Celle-ci avait été bâtie autour d’importants investissements pour rattraper le retard technologique et pour devenir un rival crédible au fondeur taïwanais TSMC. Mais les résultats tardaient à se matérialiser. La situation financière était ainsi devenue critique, obligeant notamment Intel à reporter la construction d’une méga-usine à Magdebourg en Allemagne. La société est toujours à la recherche d’un nouveau patron. Il aura pour mission de contrer l’arrivée de processeurs ARM sur PC, encouragée par Microsoft, pourtant partenaire historique d’Intel. Et aussi de réussir le virage vers les cartes graphiques dédiées à l’IA générative. Une scission de la branche fonderie, réclamée par certains investisseurs mais toujours rejetée par Pat Gelsinger, pourrait être relancée.

La Chine face aux sanctions américaines – Ciblée depuis deux ans par d’importantes restrictions d’exportation sur les puces les plus avancées et les équipements nécessaires à leur production, la Chine a enregistré des progrès inattendus. L’avancée la plus spectaculaire a été réalisée par Huawei et par le fondeur SMIC, qui ont réussi à concevoir et à graver à grande échelle une puce 5G. Depuis cependant, le groupe de Shenzhen et son partenaire marquent le pas, pénalisés par les limites de leurs équipements. Ils ne possèdent en effet pas les machines de lithographie EUV nécessaires pour obtenir des gravures plus fines, dont l’exportation vers la Chine est interdite. Dans ce domaine, le pays affiche encore des années de retard. Mais plusieurs équipementiers, soutenus par l’Etat, ont réalisé des progrès significatifs. Pour tenter de ralentir les avancées chinoises, l’administration américaine a renforcé ses sanctions en décembre. Dans la foulée, Pékin a ouvert une enquête contre Nvidia, comme il l’avait fait en 2023 contre le concepteur américain de puces mémoires Micron. Le retour au pouvoir de Donald Trump pourrait encore envenimer le conflit.

TikTok interdit aux États-Unis ? – Menacé par une interdiction aux États-Unis, TikTok va rapidement être fixé sur son sort. Vendredi, la Cour suprême va en effet étudier son recours contre une loi votée l’an passé par le Congrès. Celle-ci prévoit de contraindre la plateforme de courtes vidéos, filiale du groupe chinois ByteDance, de se séparer de ses activités américaines avant le 19 janvier. Faute de quoi elle sera bannie des boutiques d’applications. TikTok estime que cette injonction est contrainte au premier amendement de la Constitution américaine, qui garantit la liberté d’expression. En décembre, la justice avait cependant jugé que les impératifs de sécurité nationale pouvaient justifier une telle mesure. En cas de défaite devant la Cour suprême, TikTok ne pourra plus compter que sur le soutien de Donald Trump, qui reviendra au pouvoir le 20 janvier. Et qui pourrait demander au département de la Justice de ne pas faire appliquer la loi. Une vente ou une introduction en Bourse des activités américaines – ou potentiellement de l’ensemble de TikTok – apparaissent impossibles dans les délais impartis.

L’essor des lunettes connectées – Succès commercial inattendu, les Ray-Ban Meta ne seront bientôt plus seules sur le segment des lunettes connectées. Le moteur de recherche chinois Baidu a déjà présenté un modèle similaire. La marque de smartphone Xiaomi devrait rapidement suivre. Selon l’agence Bloomberg, Apple réfléchit également à se lancer plus rapidement que prévu sur ce marché. Cet intérêt représente un changement stratégique majeur. Jusqu’à présent, les grands groupes tech se concentraient en effet sur le développement de lunettes de réalité augmentée, beaucoup plus ambitieuses. Mais les progrès technologiques restent encore insuffisants pour proposer des modèles commerciaux. En attendant, les lunettes connectées profitent de l’essor de l’IA générative, qui décuple leurs fonctionnalités. Elles ne permettent plus seulement de prendre des photos et vidéos, elles permettent aussi de poser des questions sur ce que la caméra capture. Et d’autres services, comme la traduction automatique, sont annoncés. Avant même l’arrivée de la réalité augmentée, ces lunettes pourraient ainsi accélérer la transition vers l’ère post-smartphone.

Vers un rebond des levées de fonds et des IPO ? – Espéré l’an passé, le rebond des levées de fonds pour les start-up ne s’est pas encore matérialisé. Mais les plus optimistes se montrent confiants pour 2025, alors que l’intérêt des investisseurs pour l’intelligence artificielle produit déjà des effets positifs aux États-Unis. Cette tendance pourrait être renforcée par une reprise des sorties, souligne le cabinet Pitchbook. Et en particulier des introductions en Bourse (IPO), qui tournent au ralenti depuis trois ans. Le contexte semble désormais plus favorable, avec la baisse des taux directeurs et les performances solides des indices boursiers, notamment le Nasdaq. En outre, les start-up qui ont levé des fonds en 2020 ou 2021 doivent désormais offrir un exit à leurs investisseurs. Le “pipeline” de candidats à la Bourse est important, aussi bien aux États-Unis qu’en Europe. Une reprise des IPO permettrait aux fonds de capital-risque d’enfin redistribuer des plus-values à leurs investisseurs – les limited partners. Et ainsi de redonner un coup de fouet à leur collecte, ce qui leur permettrait de soutenir de nouvelles start-up.

La pression antitrust s’accentue – Déjà forte, la pression antitrust ne devrait pas faiblir en 2025. Elle devrait même s’accentuer. En Europe, les géants du numérique doivent désormais respecter le Digital Markets Act, une légalisation qui vise à renforcer la concurrence. La Commission a déjà ouvert des procédures contre Apple, Google et Meta. Le groupe à la pomme pourrait être le premier sanctionné pour ne pas avoir respecté l’interdiction de la pratique d’anti-steering. Il est aussi au cœur d’un dossier encore plus explosif: les boutiques tierces d’applications. Au Royaume-Uni, la Competition & Markets Authority a obtenu de nouveaux pouvoirs. Et elle vise les pratiques commerciales de Microsoft et d’Amazon dans le cloud. Aux États-Unis, Google lutte pour éviter une vente forcée de Chrome. Et risque un démantèlement de sa machine publicitaire. En avril, un procès devra déterminer si Meta doit se séparer d’Instagram et de WhatsApp. Apple et Amazon espèrent, eux, l’abandon des poursuites antitrust lancées par les autorités américaines. Nouveau géant de la tech, Nvidia n’est pas épargné: des enquêtes sont en cours en France, en Europe et aux États-Unis.

Le DSA à l’épreuve du feu – Le scrutin aurait presque pu passer inaperçu. Il pourrait au contraire marquer un tournant majeur dans la lutte contre la désinformation. Et constituer un test d’envergure pour le Digital Services Act, une nouvelle législation européenne qui impose notamment aux réseaux sociaux de prendre des mesures nécessaires pour lutter contre ce phénomène. En décembre, le résultat du premier tour de l’élection présidentielle en Roumanie a été invalidé par la justice, après la première place obtenue par un candidat d’extrême droite, pro russe et jusqu’alors peu connu. Selon les autorités roumaines, celui-ci aurait bénéficié d’une vaste campagne d’influence menée sur TikTok par Moscou. La plateforme de courtes vidéos est désormais ciblée par une procédure de la Commission européenne. Elle risque une forte amende. Bruxelles enquête également sur X, l’ex-Twitter, lui aussi accusé de ne pas en faire assez pour respecter le DSA. Et ce n’est pas le déploiement à grande échelle de son IA Grok, qui permet en particulier de créer des images réalistes de personnalités publiques, qui va arranger le dossier du réseau racheté par Elon Musk.

Meta face à l’équation RGPD – Huit ans après, Meta espère enfin avoir trouvé un moyen de respecter le Règlement général sur la protection des données (RGPD), qui lui impose de recueillir le consentement des internautes avant d’utiliser leurs données à des fins publicitaires. En novembre, la maison mère de Facebook et d’Instagram a lancé des versions contenant des publicités “moins personnalisées”. Celles-ci s’adressent aux utilisateurs qui ne souhaitent pas d’annonces ciblées, mais qui refusent de souscrire à un abonnement payant – dont le prix a été revu à la baisse par la société américaine. Meta répond ainsi aux critiques des Cnils européennes, qui avaient remis en cause ce principe de “pay or consent”. Ses services juridiques, vont désormais devoir convaincre les régulateurs. Jusqu’à présent, toutes les solutions proposées ont été retoquées. Un avis défavorable des Cnils compliquerait grandement la tâche du réseau social, qui ne veut pas mettre en place une demande de consentement classique. Il redoute un rejet massif de la part de ses utilisateurs, qui limiterait ses capacités de monétisation.


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