Par , publié le 29 janvier 2025

Près de 600 milliards de dollars de capitalisation boursière envolés en une seule séance. Record pulvérisé. Lundi, Nvidia a subi une sévère correction à Wall Street – avant de regagner une partie de ses pertes mardi. Le géant américain des cartes graphiques (GPU) a pris de plein fouet les avancées du laboratoire chinois DeepSeek, qui ont démontré qu’il était possible de concevoir une intelligence artificielle générative très performante avec une puissance informatique limité. Cela représente un potentiel changement de paradigme sur un secteur habitué à dépenser des sommes folles pour accroître ses capacités de calcul, en achetant des dizaines ou centaines de milliers de GPU vendus à prix d’or. Et donc une menace sur la croissance à venir des ventes de Nvidia, dont le ralentissement commençait déjà à inquiéter certains investisseurs.

Inférence – Dans un communiqué publié lundi soir, la société de Santa Clara a tenté de dédramatiser. Se félicitant d’une “excellente avancée”, elle met surtout l’accent sur l’inférence, c’est-à-dire le processus de génération d’un texte, d’une image ou d’une vidéo. Celui-ci “nécessite un nombre significatif de GPU”, rappelle-t-elle. Les plus optimistes estiment ainsi que les progrès de DeepSeek seront à terme positifs pour Nvidia. En abaissant les coûts d’entraînement et d’inférence des modèles, ils devraient en effet permettre de faire baisser le prix des fonctionnalités d’IA. Et donc de doper leur déploiement dans les entreprises, jusque-là limitée par des tarifs trop élevés. Autrement dit: ce que le groupe perdrait d’un côté, avec l’avènement d’IA plus frugales, serait plus que compensé de l’autre, avec un bond des usages.

Moins de puissance – À l’opposé, les moins optimistes redoutent des pressions sur la demande pour les GPU de Nvidia. Ces craintes reposent sur la technique d’entraînement élaborée par DeepSeek, qui requiert beaucoup moins de puissance de calcul. Le laboratoire n’a ainsi pas eu besoin d’utiliser les GPU les plus puissants, dont l’exportation vers la Chine est interdite. Et le processus aurait coûté 6 millions de dollars, une fraction des sommes dépensées par OpenAI. Le risque pour Nvidia, c’est que la voie ouverte par DeepSeek se propage, notamment via l’open source. Si certains acteurs continueront à investir massivement dans des GPU, une part grandissante du marché pourrait leur échapper, au profit de services plus abordables. Cela compliquerait leur retour sur investissement, et pourrait se répercuter sur leur niveau de dépenses d’infrastructures.

Attentes de Wall Street – Perdant sur l’entraînement, Nvidia pourrait aussi l’être sur l’inférence. Car la démocratisation attendue de l’IA ne devrait pas seulement lui profiter. Les modèles les plus sophistiqués pourraient en effet tourner sur des puces moins puissantes, les siennes mais aussi celles de ses concurrents, commercialisés à des prix inférieurs. Et d’autres modèles pourraient tourner en local, directement sur le processeur d’un ordinateur ou d’un smartphone. L’inférence ne s’effectuera alors plus dans des data centers, très majoritairement équipés de GPU de Nvidia. Tout cela ne signifie pas pour autant que son chiffre d’affaires va forcément reculer. Mais que la société aura, peut-être, plus de mal à atteindre les attentes très élevées de Wall Street, qui l’ont un temps propulsée au rang de première capitalisation boursière mondiale.

Pour aller plus loin:
– DeepSeek, symbole d’un échec du modèle américain dans l’IA
– Nvidia rassurant sur le lancement de sa prochaine puce d’IA


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