Par , publié le 5 février 2025

Depuis son lancement officiel en 2008, Spotify n’avait connu que quelques rares trimestres rentables. Et la plateforme suédoise de streaming n’avait jamais terminé une année entière dans le vert. C’est désormais chose faite: en 2024, elle a dégagé un bénéfice opérationnel de 1,4 milliard d’euros, contre une perte de 446 millions l’année précédente. Pendant longtemps, “nous ne nous sommes pas préoccupés de la rentabilité”, reconnaît aujourd’hui Daniel Ek, son fondateur et patron, soulignant que les efforts étaient surtout concentrés sur “l’obtention d’une échelle significative”. Cette stratégie a porté ses fruits: avec plus de 650 millions d’utilisateurs, la société est de très loin le premier acteur du marché (hors Chine). “Nous prouvons désormais que nous pouvons aussi être une entreprise rentable”, se félicite Daniel Ek.

Échec des podcasts – Si Spotify a mis du temps à dégager des profits, c’est aussi en raison de la limite de son modèle économique: les importantes royalties versées aux ayants droit. L’an passé, celles-ci ont atteint près de 11 milliards de dollars, soit 70% de son chiffre d’affaires. Pour surmonter ce problème, la société a d’abord misé sur les podcasts. Elle a ainsi racheté au prix fort plusieurs studios. Et signé des chèques importants à quelques personnalités et podcasteurs vedettes, comme le controversé Joe Rogan. Daniel Ek estimait que cette activité pourrait générer d’importantes recettes publicitaires, sans royalties supplémentaires. Et donc qu’elle permettrait de dégager des marges plus élevées. Dans les faits, la division podcast a accusé de très lourdes pertes, obligeant Spotify à revoir ses ambitions à la baisse.

Plans sociaux – Pour trouver le chemin de la rentabilité, Spotify a donc dû changer de stratégie. L’entreprise a d’abord fortement coupé dans ses coûts. En 2023, elle a mené trois plans sociaux successifs, supprimant environ 2.300 emplois, soit près du quart de sa main-d’œuvre. En plus de limiter ses investissements dans les podcasts, elle a également réduit significativement ses budgets marketing. “La croissance de nos dépenses a été deux fois plus forte que celle de nos recettes”, justifiait à l’époque Daniel Ek, assurant que cette évolution n’était “pas tenable à long terme”. L’an passé, ces économies se sont chiffrées à près de 500 millions d’euros. Pour aller encore plus loin, Spotify vient de se livrer à un tour de passe-passe aux États-Unis, qui va lui permettre de verser 150 millions de dollars en moins à l’industrie du disque.

Hausse des prix – Dans le même temps, Spotify a revu ses prix à la hausse. À l’été 2023, la plateforme a en effet mis fin à sa tarification historique de dix euros par mois. Son offre standard est désormais vendue un euro de plus. Et elle coûte même deux dollars de plus aux États-Unis. Si elles marquent une véritable rupture, ces augmentations ne représentent pas un pari. D’une part, parce que l’élasticité prix, c’est-à-dire l’évolution de la demande en fonction des tarifs, est extrêmement faible, voire quasiment nulle. D’autre part, parce que Spotify n’a fait que s’aligner sur la concurrence. De fait, il n’y a pas eu de vague de désabonnements: son offre payante a même gagné 43 millions de clients depuis un an et demi. Comme sur le streaming vidéo, il ne serait donc pas étonnant que la hausse se poursuive.

Pour aller plus loin:
– Les “superfans”, nouvelle vache à lait du streaming musical
– Pourquoi l’industrie du disque accuse Spotify de “trahison”


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