Chez Intel, les grandes ambitions industrielles de Pat Gelsinger font définitivement partie du passé. Deux mois après le départ forcé de son directeur général, le géant américain des semi-conducteurs ne rêve plus de concurrencer TSMC sur les activités de fonderie. Ni de rivaliser avec Nvidia sur les cartes graphiques dédiées à l’intelligence artificielle générative. Il cherche désormais à maximiser la valeur pour ses actionnaires, rapporte le Wall Street Journal, alors que son cours boursier a été divisé par trois en quatre ans. Dans cette optique, la direction par intérim semble prête à étudier toutes les options. Même celle d’une vente à la découpe de l’ancien fleuron des processeurs. Le quotidien américain évoque ainsi un intérêt de Broadcom pour les activités de conception de puces. Et un intérêt de TSMC pour celles de production.
Pertes – Intel a longtemps régné sur le marché des processeurs sur les ordinateurs et serveurs. Mais la société a raté le virage des smartphones, supplantée par l’architecture Arm. Et elle a été dépassée par l’essor du modèle de sous-traitance dit fabless. D’autant plus qu’elle a pris du retard sur les gravures les plus fines, perfectionnées par le fondeur taïwanais TSMC. Arrivé aux manettes en 2021, Pat Gelsinger espérait relancer Intel en remettant en cause le modèle historique d’intégration verticale et en investissant dans de nouvelles usines. Mais sa stratégie s’est vite heurtée à la réalité. Le chiffre d’affaires a continué de reculer, plombé par le marché du PC. Sa nouvelle activité de fonderie n’a pas encore décollé, malgré des contrats signés avec Microsoft et Amazon. Et Intel a accusé en 2024 sa première perte annuelle depuis 1986.
Puces d’IA – Les difficultés d’Intel aiguisent les appétits. D’autant que sa capitalisation boursière, tombée à 100 milliards de dollars, n’est plus un obstacle insurmontable. À l’automne, Qualcomm avait déjà étudié le dossier, sans faire d’offre. Le départ de Pat Gelsinger pourrait relancer cette hypothèse. Un rachat des activités de conception par Broadcom s’inscrirait, lui, dans la stratégie d’acquisition menée ces dernières années par son patron Hock Tan. Fin 2023, le concepteur de semi-conducteurs a notamment mis la main sur le spécialiste de la virtualisation VMware pour 61 milliards de dollars. Il vise désormais le marché de l’IA générative, un domaine sur lequel Intel, bien qu’en retard, possède des expertises. Selon la presse américaine, Broadcom va notamment développer une puce d’IA avec OpenAI. Et une autre avec Apple.
TSMC dans le capital ? – Le sort de l’activité fonderie est plus complexe. D’une part, parce que celle-ci affiche de lourdes pertes. D’autre part, parce qu’elle représente un enjeu géopolitique. Pour cette raison, c’est l’administration Trump qui aurait lancé les discussions avec TSMC. Mais le scénario d’une prise de contrôle par le groupe taïwanais, comme évoqué par plusieurs médias, semble peu probable. Ce dernier pourrait en revanche prendre une participation dans l’activité fonderie d’Intel, lui apportant des liquidités bienvenues pour poursuivre ses investissements en attendant le déploiement de son nouveau processus de gravure. La presse taïwanaise avance une entrée dans le capital à hauteur de 20%. En échange, TSMC pourrait espérer ne pas être ciblé par les droits de douane supplémentaires promis fin janvier par Donald Trump.
Pour aller plus loin:
– Intel repousse la construction de sa méga-usine européenne
– Après l’échec du plan de relance d’Intel, Pat Gelsinger poussé à la retraite