C’est une première qui pourrait faire jurisprudence au détriment d’Apple – mais pas seulement. La semaine dernière, la justice britannique a estimé que le groupe à la pomme avait abusé de sa position dominante en imposant des commissions jugées “excessives” sur les applications mobiles. Une décision qui ouvre la voie à une indemnisation des consommateurs, qui pourrait atteindre jusqu’à 1,5 milliard de livres sterling (1,7 milliard d’euros).
L’affaire a débuté en 2021, avec le dépôt d’une action en nom collectif devant le tribunal britannique chargé des affaires de concurrence (CAT), saisi pour la première fois d’une plainte contre un géant du numérique. Le procès s’est tenu en début d’année. Et de nouvelles audiences sont prévues en novembre pour déterminer les modalités de calcul des dédommagements que devra verser Apple. La société a d’ores et déjà annoncé son intention de faire appel de sa condamnation.
Double monopole
Pour les magistrats britanniques, l’entreprise de Cupertino exerce bien un double monopole. D’une part, sur la distribution d’applications au sein de son système iOS, exclusivement réservée à sa propre boutique, l’App Store. D’autre part, sur les achats in-app, qui doivent obligatoirement passer par sa plateforme de paiement. Les juges ont ainsi écarté une définition plus large du marché défendue par Apple, qui le place en compétition avec l’écosystème Android de Google.
Les arguments de la société sur la sécurité ont également été écartés par le CAT. Celle-ci justifie systématiquement ces restrictions par la volonté de créer un “environnement sûr et sécurisé” pour ses utilisateurs. Mais pour les magistrats, ces limitations ne sont pas “nécessaires” pour atteindre cet objectif, et encore moins “proportionnées”. Elles constituent donc un “abus de position dominante” ayant permis à Apple de “restreindre” la concurrence.
Que le début ?
Profitant de cette situation, le groupe a pu prélever des commissions “excessives” entre 2015 et fin 2020. Celles-ci s’élevaient alors à 30% – un taux réduit de 15% a depuis été introduit. Selon le CAT, le niveau “compétitif” se situe à 17,5% pour les téléchargements payants et à 10% pour les achats intégrés. Le tribunal estime que la moitié de ce surcoût a été répercutée sur les consommateurs, qui ont désormais droit à un remboursement intégral.
La défaite d’Apple pourrait n’être que le début. Fin 2024, le CAT a en effet autorisé la poursuite d’une autre affaire, également centrée sur l’App Store, mais intentée au nom des développeurs d’applications. Une association de consommateurs a par ailleurs porté plainte, accusant la société d’avoir “enfermé” ses utilisateurs dans son service de stockage iCloud. Et d’autres procédures similaires ont également été lancées contre Microsoft, Google et Meta.
Pour aller plus loin:
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– Apple préserve son accord à 20 milliards de dollars par an avec Google

