C’était l’une des dernières figures historiques encore actives au quotidien chez Google. La semaine dernière, Susan Wojcicki a annoncé qu’elle quittait son poste de directrice générale de YouTube, qu’elle occupait depuis neuf ans. La responsable, qui avait milité pour le rachat de la plateforme de vidéos en 2006 pour 1,65 milliard de dollars, souhaite “ouvrir un nouveau chapitre”. Elle conservera un rôle de conseillère au sein du moteur de recherche. Sous sa direction, YouTube a nettement accéléré sa monétisation, jusqu’à représenter 10% du chiffre d’affaires de sa maison mère. Mais n’a pas été épargné par les échecs et les polémiques. Susan Wojcicki est remplacée par Neal Mohan, jusqu’à présent directeur produit de Youtube. Un fidèle lieutenant qui devrait s’inscrire dans la lignée de celle qui l’a recruté.
Garage – Employée numéro 16, Susan Wojcicki a rejoint Google en 1999. Un an plus tôt, c’est dans le garage de sa maison de Menlo Park que la jeune société fondée par Larry Page et Sergei Brin avait installé ses premiers bureaux. D’abord chargée du marketing, la dirigeante a participé à plusieurs lancements de produits, dont Google Image. Son influence a toujours été grande: elle a joué un rôle majeur dans l’acquisition de YouTube, puis de la régie publicitaire DoubleClick en 2007, pour 3,1 milliards de dollars. Elle a ensuite supervisé l’offre publicitaire de l’entreprise, notamment le programme de liens sponsorisés AdWords, son cœur d’activité. En 2013, un an avant son arrivée chez YouTube, le magazine spécialisé Adweek l’avait nommée personnalité la plus puissante du monde publicitaire.
Baisse des recettes – En neuf ans, Susan Wojcicki a réussi sa principale mission: transformer un formidable succès d’audience en réussite financière. Entre 2013 et 2022, le chiffre d’affaires de YouTube est ainsi passé d’environ 3 milliards de dollars à 29,2 milliards. Une partie de cette hausse provient du lancement d’une offre payante, qui compte désormais 80 millions d’abonnés. Cette monétisation a permis de fidéliser les créateurs de contenus, qui récupèrent une partie des recettes. Ces derniers mois, la plateforme de vidéos a cependant été rattrapée par le ralentissement du marché publicitaire, plombé par un contexte macroéconomique défavorable. Pour la première fois de son histoire, YouTube accuse une baisse de ses revenus publicitaires, qui ont reculé de 8% au quatrième trimestre.
Courtes vidéos – Deux autres menaces se dressent devant Neal Mohan. D’abord, la concurrence grandissante de TikTok, qui a dépassé la barre du milliard d’utilisateurs. En 2021, YouTube a lancé une copie de l’application de courtes vidéos verticales, baptisée Shorts et qui génère désormais plus de 30 milliards de visionnages par mois. La société dispose d’un avantage de taille: sa capacité à mieux rémunérer les créateurs, le principal point faible de son nouveau rival. En février, elle a ainsi étendu son programme de partage des recettes publicitaires à ce nouveau format. Deuxième menace: la potentielle remise en cause de la protection juridique des plateformes Internet par la Cour suprême des États-Unis, qui provoquerait des répercussions majeures sur son fonctionnement.
Pour aller plus loin:
– Le chiffre d’affaires de YouTube baisse, une première
– Pour contrer TikTok, YouTube va rémunérer les créateurs de courtes vidéos
