Par , publié le 17 septembre 2024

C’est une brèche dans laquelle s’étaient engouffrés avec grand succès Shein puis Temu qui va bientôt se refermer. Vendredi, l’administration Biden a annoncé vouloir mettre fin à l’exemption de droits de douane sur les importations de biens d’une valeur inférieure à 800 dollars. En Europe, la Commission devrait proposer un changement similaire, affirmait en juillet le Financial Times. Cette règle a grandement contribué à l’essor des deux plateformes chinoises d’e-commerce, qui expédient les achats directement depuis des entrepôts situés en Chine. Elle leur a en effet permis de bénéficier d’un avantage compétitif sur leurs concurrents, dont le modèle ne leur permettait pas de bénéficier de cette exonération. Et ainsi de gagner des parts de marché avec leurs prix cassés, plébiscités par une partie des consommateurs occidentaux.

Milliards de colis – Ces exemptions dites “de minimis” devaient initialement faciliter les échanges internationaux et simplifier le travail des douanes. En 2016, les États-Unis avaient même relevé le seuil de 200 à 800 dollars. Depuis, l’émergence du commerce cross border a radicalement changé la donne. En dix ans, le nombre de colis échappant aux taxes douanières est passé de 140 millions par an à plus d’un milliard en 2023. En Europe, où l’exonération s’applique jusqu’à 150 euros, le volume se chiffre à deux milliards. Face à cette déferlante, les autorités américaines et européennes proposent désormais de faire marche arrière, en appliquant les droits de douane à tous les produits importés, quelle que soit leur valeur. Aux États-Unis, 40% des biens venant de Chine sont concernés, dont 70% pour l’habillement.

Amazon débordé sur les prix – Shein et Temu ont bousculé le secteur du commerce en ligne, en prenant le contre-pied d’Amazon, leader sur les marchés occidentaux. Au lieu d’entrer en concurrence frontale, les deux sociétés chinoises ont opté pour une approche transfrontalière. Leurs commandes ne sont pas envoyées depuis des entrepôts américains ou européens, dans une course de vitesse pour les livrer en un ou deux jours. Elles le sont depuis des entrepôts chinois, ce qui permet de limiter les coûts logistiques. En ajoutant des tarifs postaux avantageux, dans le cadre d’une convention internationale elle aussi remise en question, et l’exemption de droits de douane, Shein et Temu ont pu déborder Amazon sur le bas de l’échelle des prix. Symbole de leur succès, le géant américain a lancé cet été une contre-offensive.

Hausse des prix – Face à la menace, les groupes chinois – dont fait aussi partie Aliexpress d’Alibaba – se veulent rassurants. Ils assurent que leur folle croissance n’est pas liée à cette brèche douanière. Shein met en avant son “modèle à la demande unique” – les vêtements ne sont d’abord fabriqués qu’en petites quantités. Temu insiste, lui, sur son “modèle qui élimine les intermédiaires inutiles”. L’impact sur les prix reste difficile à déterminer. Une commission du Congrès américain estime qu’ils pourraient augmenter de 20%, réduisant d’autant l’avantage tarifaire des deux plateformes. Or, celui-ci est primordial, car il permet de compenser des délais de livraison bien plus longs. Ce resserrement réglementaire intervient en plus à un moment charnière, entre baisse de la croissance et entrée en vigueur du DSA en Europe.

Pour aller plus loin:
– Bousculé sur les prix, Amazon reprend les recettes de Shein et Temu
– Premiers signes de ralentissement pour Temu


No Comments Yet

Comments are closed

Contactez-nous  –  Politique de confidentialité