Par , publié le 28 septembre 2020

C’est un déménagement qui en dit long. Fondé à Palo Alto, en plein cœur de la Silicon Valley, Palantir vient de transférer son siège social à Denver, dans le Colorado. La société, qui s’introduit ce mardi en Bourse, veut ainsi symboliquement prendre ses distances avec l’industrie technologique américaine avec laquelle elle “partage de moins en moins de valeurs”, selon Alex Karp, son directeur général. Spécialisé dans l’analyse de gigantesques quantités de données, Palantir assume au contraire sa mission: aider les agences de renseignements, les armées, les services de police… “Nous avons choisi notre camp”, poursuit son patron.

Liens historiques avec la CIA – Palantir a été crée en 2004 à l’initiative de Peter Thiel, personnalité décriée de la Silicon Valley. Trois ans après les attentats du 11 septembre 2001, il souhaite mettre à profit la puissance des algorithmes informatiques et l’émergence du big data pour déjouer de futures attaques terroristes. Son premier client: la CIA, qui a besoin de moderniser ses méthodes d’investigation. L’agence deviendra ensuite l’un des premiers investisseurs de l’entreprise. Depuis, celle-ci a séduit les Marines, le FBI ou encore la DGSI en France. On lui attribue un rôle dans la traque d’Oussama Ben Laden, en 2011. Une information qu’elle ne confirmera jamais, mais qu’elle ne démentira pas non plus.

Projet Maven – Dans le prospectus d’introduction en Bourse de Palantir, le mot gouvernement apparaît ainsi plus de 300 fois. Une anomalie dans Silicon Valley, toujours prudente avant de mettre ses outils dans les mains des autorités, notamment sous la pression de ses employés. Une “élite” qui “ne sait pas comment doit être organisée la société”, rétorque Alex Karp. Et de citer l’exemple du projet Maven, abandonné par Google face à la contestation interne. Mené par le Pentagone, celui-ci vise à d’améliorer l’analyse des images vidéo filmées par les drones de l’armée américaine en utilisant des logiciels de machine learning. Le contrat a depuis été récupéré par… Palantir.

Clients perdus ? – “Notre logiciel est parfois utilisé pour tuer des gens”, reconnaît sans gêne Alex Karp. Qu’importe l’opinion majoritaire de la Silicon Valley. Qu’importent les multiples polémiques. Ce n’est pas à Palantir, ou à la Silicon Valley, de distinguer ce qui est juste de ce qui ne l’est pas, mais aux parlementaires et aux citoyens, estime son patron, qui ne manque pas de rappeler son opposition à certaines politiques menées par l’administration Trump. Mais les controverses pourraient aussi faire fuir des clients potentiels – en particulier des entreprises -, reconnait la société dans ses documents boursiers. Alors même qu’elle continue d’accuser de lourdes pertes.


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