Par , publié le 10 mars 2021

Pendant quinze ans, Sridhar Ramaswamy a été au cœur de la puissante machine publicitaire de Google. Après un court passage dans un fonds de capital-risque, il se lance désormais dans un immense défi: concurrencer son ancien employeur avec Neeva, un moteur de recherche à la philosophie diamétralement opposée. Son modèle économique ne repose en effet pas sur la publicité, mais sur un abonnement payant dont le prix, encore non fixé, devrait être compris entre 5 et 10 dollars par mois. Un défi qui n’effraie cependant pas certains investisseurs: lundi, la start-up a officialisé sa deuxième levée de fonds, d’un montant de 40 millions de dollars.

Expérience utilisateur – Selon Sridhar Ramaswamy, le modèle payant doit permettre de replacer l’expérience utilisateur au centre des préoccupations, là où les autres moteurs de recherche doivent arbitrer avec la nécessité de mettre leurs publicités en avant pour obtenir le plus de clics possible. Son meilleur argument ? Le travail de recherche mené en 1998 par Larry Page et Sergey Brin. “Les moteurs de recherche financés par la publicité favoriseront inévitablement les annonceurs au détriment des besoins des consommateurs”, écrivent alors les futurs fondateurs de Google. La suite leur a donné raison, assure aujourd’hui leur ancien employé, soulignant que la société place toujours plus de publicités avant les résultats les plus pertinents.

Données personnelles – Contrairement à d’autres moteurs alternatifs, comme DuckDuckGo ou Qwant, Neeva va bien collecter des données personnelles de ses utilisateurs. Mais la start-up promet de ne jamais les vendre ou de les utiliser à des fins publicitaires. Et de les effacer au bout de 90 jours. Elle indique que ces données permettront de proposer un service personnalisé, affichant la météo de votre ville, les résultats sportifs de vos équipes préférées ou des informations susceptibles de vous intéresser – à l’image de ce que propose Google. “Un moteur de recherche qui ne sait rien sur vous ne vous offrira jamais une meilleure expérience”, assure Sridhar Ramaswamy. “Tout en respectant la vie privée”, précise-t-il.

Qui va payer ? – En phase de tests depuis l’été 2020, Neeva doit être officiellement lancé cette année. Son patron assure que “des dizaines de milliers de personnes” se sont déjà inscrites sur la liste d’attente. Mais convaincre le grand public apparaît très illusoire. D’abord, parce que Google dispose d’une image de marque qui lui assure, malgré les polémiques, une part de marché de 90% dans la recherche. Ensuite, parce qu’il est difficile de faire payer quelque chose habituellement gratuit. Certes, le débat sur la vie privée a suscité une prise de conscience sur les abus du pistage publicitaire. Mais des études montrent que peu d’internautes sont prêts à souscrire à un service payant garantissant la protection de leurs données personnelles.

Pour aller plus loin:
– Les Etats-Unis lancent une procédure antitrust contre Google
– L’Europe s’interroge sur l’efficacité des amendes infligées à Google


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