Par , publié le 12 janvier 2024

Les plus optimistes veulent y voir un simple retour à la normale après deux années d’euphorie post-Covid, aujourd’hui qualifiées d’anomalies. En 2023, la French Tech a accusé une chute de 38% des levées de fonds, dont le montant est retombé à 8,3 milliards d’euros contre 13,5 milliards en 2022 – un record. Cette forte baisse, qui n’épargne aucun pays, trouve sa source dans le resserrement des politiques monétaires pour lutter contre l’envolée de l’inflation. Cela a mis fin à l’argent facile qui avait inondé les marchés. Et qui avait poussé les fonds à investir sans compter dans les start-up, tout en acceptant des niveaux de valorisation rarement vu. Autre symbole: une seule société, Mistral AI, a franchi la barre du milliard de dollars de valorisation – et atteint le statut de licorne tant vénéré par la French Tech.

Méga-levées – Le repli est particulièrement visible chez les start-up les plus matures. Le nombre de méga-levées, supérieures à 100 millions d’euros, a chuté de plus de moitié. Celles-ci ont permis de recueillir 2,6 milliards, contre 6,2 milliards en 2022. Cela s’explique d’abord par le retrait de grands fonds étrangers, comme le japonais Softbank ou l’américain Tiger Global, capables d’injecter des centaines de millions. Mais aussi par la trésorerie accumulée par ces entreprises pendant la période faste, leur permettant de financer leurs pertes ou leurs investissements sans avoir à mener un down round – une levée réalisée sur la base d’une valorisation en baisse. Les tours de tables pour les start-up qui viennent de se lancer ont mieux résisté. Au prix cependant d’une hausse de la dilution, la part du capital cédée aux investisseurs.

Licenciements – Face à la baisse des levées de fonds, les entrepreneurs de la French Tech ont dû changer de logiciel. Ils ont délaissé l’hypercroissance à tout prix, au profit du contrôle, voire de la baisse, des dépenses pour réduire la consommation de trésorerie. Cela s’est notamment traduit par des coupes dans les effectifs ou par des recrutements moins importants qu’initialement prévu. Cette bascule a aussi été imposée par les fonds de capital-risque, beaucoup plus réticents à financer les groupes aux perspectives lointaines de rentabilité. Beaucoup de start-up ont dû se tourner vers des sources de financements alternatifs, comme le financement basé sur les revenus ou les prêts venture. Les procédures de conciliation avec les créanciers se sont multipliées. Tout comme les redressements et les liquidations judiciaires.

Reprise en 2024 ? – En France, comme ailleurs, l’incertitude demeure sur la reprise des levées, alors que les taux d’intérêt restent au plus haut. Et que les introductions en Bourse tournent toujours au ralenti. Les plus confiants soulignent, encore et toujours, que le dry powder, les liquidités que les fonds doivent investir, affiche un niveau historiquement élevé. Des sommes qui finiront bien par être déployées. Maya Noël, la directrice générale de France Digitale, compte, elle, beaucoup sur la deuxième phase de l’initiative Tibi, qui doit mobiliser 7 milliards d’euros de fonds privés. Et Franck Sebag, associé chez EY, mise sur “la montée en puissance” de l’intelligence artificielle générative et des greentech, et sur la baisse attendue des taux des banques centrales. De quoi “garantir une accélération des investissements”, prédit-il.

Pour aller plus loin:
– Entre catastrophisme et espoir, la French Tech navigue à vue
– Chute historique des levées de fonds des start-up européennes


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