Par , publié le 1 février 2024

Plus rien ne semble s’opposer à l’adoption de l’AI Act. Mardi, l’Allemagne a en effet annoncé qu’elle voterait en faveur de ce projet européen de réglementation de l’intelligence artificielle, après avoir trouvé un compromis au sein de sa coalition gouvernementale. Une décision qui réduit à néant les efforts de Paris pour former une minorité de blocage. D’autant plus que l’Italie, qui avait aussi émis des réserves, ne devrait également pas s’opposer au texte. Interrogé, Matignon n’a pas souhaité partager la position définitive de la France, établie en début de semaine après une réunion interministérielle. Les représentants permanents des Vingt-Sept doivent donc officiellement approuver le texte ce vendredi à Bruxelles. L’AI Act sera ensuite renvoyé devant le Parlement pour un dernier vote. A priori une formalité.

Longues négociations – La volonté de réguler l’intelligence artificielle en Europe date de 2021. Une autre… époque. Les inquiétudes portaient alors sur les dispositifs d’identification biométrique ou encore les systèmes de police prédictive. Mais l’émergence récente des IA génératives a contraint les responsables européens à revoir leur copie. Au terme de longues négociations entre le Parlement, la Commission et le Conseil européens, la version définitive du texte n’a été envoyée qu’il y a dix jours. Sur l’IA générative, celui-ci introduit d’abord des obligations de transparence sur le processus d’entraînement des modèles, avec l’obligation de publier un résumé “suffisamment détaillé” des données utilisées. Cela pourrait permettre aux détenteurs de droits de réclamer une rémunération si leurs œuvres ont été utilisées.

“Risques systémiques” – L’AI Act réaffirme par ailleurs que les sociétés du secteur doivent respecter le droit d’auteur européen. Et, avec lui, la possibilité pour les auteurs, les artistes ou les médias de refuser que leurs contenus participent à l’entraînement des modèles. Le projet impose aussi la mise en place d’un dispositif d’identification des contenus générés par l’IA, permettant de distinguer les fausses photos ou vidéos. Les réglementations les plus strictes ne s’appliqueront qu’aux modèles présentant des “risques systémiques” – déterminés par la puissance de calcul qui a été nécessaire pour les entraîner. Ceux-ci auront, par exemple, l’obligation de mener des études d’impact sur les risques et sur les mécanismes mis en place pour les limiter. Un bureau européen de l’IA sera chargé de faire appliquer ces règles.

Handicap pour l’Europe ? – Les détracteurs de l’AI Act reproche à l’Europe de vouloir réglementer trop tôt le secteur. Et surtout d’être la seule à le faire. Ils redoutent ainsi que le texte ne handicape les sociétés européennes, en particulier face à leurs rivales américaines. Poussé notamment par Cédric O, l’ancien secrétaire d’Etat au numérique, devenu lobbyiste pour la start-up Mistral AI, la France militait ainsi pour une approche différente, qui ne vise pas les modèles mais les services d’IA qui les utilisent. Sur ce point, elle n’aura obtenu qu’une petite victoire: le texte ne concerne plus les modèles fondamentaux mais les modèles “à usage général”, une dénomination plus restrictive. Paris s’opposait aussi à une transparence totale des données d’entraînement. Mais a simplement obtenu que soit mentionné le “respect du secret des affaires”.

Pour aller plus loin:
– Comment Cédric O tente de faire échouer le projet de régulation de l’IA générative
– Le double discours d’OpenAI sur la régulation de l’IA


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