Par , publié le 27 mai 2024

250 millions de dollars sur cinq ans. C’est l’énorme chèque qu’a accepté de signer OpenAI à News Corp, le conglomérat de médias du milliardaire Rupert Murdoch. En échange, le concepteur de ChatGPT va pouvoir utiliser les contenus du Wall Street Journal, du New York Post ou encore du Times pour entraîner ses modèles d’intelligence artificielle générative. Ce partenariat n’est pas le premier. Depuis le début de l’année, la start-up multiplie en effet les accords avec les médias aux États-Unis et en Europe. La liste inclût l’agence Associated Press, Le Monde, le Financial Times ou encore le groupe de presse allemand Axel Springer (Bild, Die Welt, Politico…). Mais c’est la première fois que le montant qu’elle dépense – dont une partie devrait être apportée en crédits d’utilisation de ses services d’IA – fuite dans la presse.

Plusieurs plaintes – Ces partenariats s’inscrivent dans une nouvelle stratégie mise en place par OpenAI. Jusqu’en 2020, la société expliquait s’alimenter auprès de Wikipedia et de deux bibliothèques de livres, simplement appelées Books1 et Books2, qui contenaient selon des chercheurs plusieurs centaines de milliers d’ouvrages piratés. Cette méthode est au cœur de plusieurs procédures judiciaires lancées par des auteurs. OpenAI est aussi poursuivi par le New York Times. Le grand quotidien new-yorkais l’accuse, exemples à l’appui, d’avoir utilisé, sans aucune autorisation ni rémunération, des millions d’articles pour entraîner ses grands modèles de langage. Il lui réclame des “milliards de dollars dommages” et la mise hors ligne des modèles alimentés par ses contenus. Huit quotidiens locaux américains ont suivi la même voie.

Baisse du trafic  – Avec ces accords, OpenAI s’achète la paix avec les grands médias – comme l’ont fait Google et Facebook, qui ont multiplié les initiatives, le plus souvent rémunératrices, notamment auprès des grands titres de presse écrite. Sur le plan judiciaire d’abord, en obtenant le droit d’utiliser leurs contenus. Sur le plan médiatique ensuite, limitant les critiques sur l’impact négatif attendu de l’intelligence artificielle générative. L’émergence des chatbots menace en effet de modifier radicalement la manière dont les internautes trouvent des informations, leur permettant d’obtenir la réponse qu’ils cherchent sans jamais avoir à cliquer sur un lien. Le magazine américain The Atlantic prédit ainsi une chute de 75% des visites générées par les moteurs de recherche, qui représentent environ 40% de son trafic.

Résistance futile ? – En s’associant à OpenAI, ces médias pourraient donc alimenter la machine qui va décimer leurs recettes publicitaires. Mais ont-ils vraiment le choix ? “Sans accord, ils utiliseront notre contenu de manière plus ou moins clandestine, sans aucun avantage pour nous”, regrette Louis Dreyfus, le président du directoire du Monde, cité par le Wall Street Journal. Et la start-up peut nouer des partenariats avec d’autres titres. Ces groupes préfèrent donc prendre un chèque plutôt que de mener une résistance qui semble futile. D’autant plus qu’OpenAI leur promet un traitement de faveur: des liens vers leurs articles dans les réponses de ChatGPT – un moyen de réduire la baisse attendue du trafic. Ces accords profitent une nouvelle fois aux grands médias, au détriment des plus petits qui seront, eux, les grands perdants.

Pour aller plus loin:
– Comment OpenAI tente d’éviter de nouvelles poursuites judiciaires
– Pourquoi les procédures judiciaires se multiplient contre OpenAI


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