Par , publié le 30 septembre 2024

Les pertes sont aussi spectaculaires que le succès de ChatGPT. Et soulignent le difficile modèle économique de l’intelligence artificielle générative, plombée par les coûts de développement et de fonctionnement des modèles. Selon des documents consultés par le New York Times, OpenAI s’attend en effet à perdre cinq milliards de dollars cette année. Le pionnier du secteur va pourtant enregistrer une forte croissance de son chiffre d’affaires, qui devrait atteindre 3,7 milliards. Mais ses dépenses se sont aussi envolées. Ce déficit abyssal, qui n’inclut même pas les coûts liés à la rémunération en actions des employés, pourrait expliquer la volonté de mener une nouvelle levée de fonds, d’un montant attendu de 6,5 milliards de dollars. Celle-ci devrait être bouclée cette semaine, sur la base d’une valorisation de 150 milliards.

7 milliards pour Microsoft – Les derniers modèles d’IA générative nécessitent une importante puissance informatique, qu’OpenAI va chercher auprès d’Azure, la plateforme de cloud de Microsoft, son principal actionnaire et soutien financier. D’abord, pour leur phase d’entraînement qui s’effectue, pendant plusieurs mois, à l’aide de supercalculateurs équipés de centaines ou de milliers de cartes graphiques. Et ensuite, pour l’inférence: leur exécution pour créer des textes, des images ou des voix. La facture peut alors grimper rapidement à mesure que les services gagnent en popularité. Avec 350 millions d’utilisateurs actifs par mois, ChatGPT représente ainsi des dépenses astronomiques pour OpenAI. Malgré des tarifs préférentiels négociés avec Microsoft, la start-up devrait ainsi lui verser sept milliards de dollars en 2024.

Hausse des prix – Sur les 3,7 milliards de dollars de recettes, 2,7 milliards proviennent des abonnements payants de ChatGPT. Le robot conversationnel compte plus de dix millions de clients à son offre Plus, qui permet d’accéder aux dernières fonctionnalités, rapporte The Information. S’y ajoutent un million d’utilisateurs à l’offre destinée aux grandes entreprises. Le milliard de dollars restant est généré par les interfaces de programmation qui permettent aux développeurs d’utiliser les modèles d’OpenAI. La start-up anticipe une forte accélération de ses recettes. Elle vise 11,6 milliards l’an prochain, puis 100 milliards en 2029. Une partie de cette croissance viendra d’une hausse des tarifs. ChatGPT Plus devrait passer de 20 à 22 dollars par mois d’ici à la fin de l’année. Avant de coûter 44 dollars dans cinq ans.

Nouveau statut – Cette stratégie semble risquée, alors que la concurrence s’intensifie sur le marché, avec des rivaux qui comblent petit à petit leur retard. Mais OpenAI espère mettre en avant les gains de productivité obtenus avec des IA encore plus puissantes. Elle compte aussi probablement sur des tarifs aussi élevés chez la concurrence. La société n’aura de toute façon peut-être pas le choix pour compenser les coûts d’inférence, qui empêchent des économies d’échelle. Et également pour atteindre les objectifs financiers qu’elle fait miroiter à ses nouveaux investisseurs. Pour y parvenir, elle prévoit aussi de modifier sa structure juridique, au cœur des conflits qui ont éclaté l’an passé. OpenAI devrait ainsi se défaire de la supervision par un conseil à but non lucratif et adopter un statut qui ne restreint plus ses profits.

Vague de départs – Dans le cadre de ce changement, Sam Altman pourrait recevoir une part du capital. Plusieurs médias évoquent le chiffre de 7%, que l’intéressé a indirectement démenti. Soutenu par l’ensemble des employés lors de son éviction, le patron d’OpenAI ne semble plus faire l’unanimité en interne. On lui reproche de plus être impliqué au quotidien. Ou encore de délaisser tous les garde-fous de sécurité, à l’image du lancement précipité de son modèle GPT-4o en mai, à la veille d’une conférence de Google. Depuis le début de l’année, une vingtaine de dirigeants de la société ont quitté leur poste. La dernière en date: Mira Murati, la très respectée directrice de la technologie, qui explique vouloir “mener sa propre exploration”. Dans la foulée, deux responsables de la recherche ont également présenté leur démission.
Pour aller plus loin:
– La face cachée d’OpenAI, rattrapé par de multiples polémiques
– Comment la course aux profits s’est imposée dans l’intelligence artificielle


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