Par , publié le 9 octobre 2024

Amazon devra bien affronter un procès antitrust aux États-Unis. Dans une décision rendue publique lundi, la justice a en effet rejeté une requête du géant du commerce en ligne, qui demandait l’invalidation des poursuites lancées l’an passé par la Federal Trade Commission (FTC). Le gendarme américain de la concurrence l’accuse d’abus de position dominante, citant des pratiques qui lui auraient permis de préserver ses parts de marché et d’optimiser ses profits. Le juge chargé de l’affaire a cependant écarté une partie des allégations formulées par les procureurs généraux des dix-neuf États qui se sont joints à la plainte de la FTC. Le procès doit se tenir en octobre 2026. Si la société est reconnue coupable, une deuxième procédure s’ouvrira alors pour déterminer les mesures correctives qu’elle devra mettre en place.

Prix le plus bas – La majorité des accusations de la FTC est centrée autour de la marketplace d’Amazon, sa place de marché qui met en relation des marchands tiers et des acheteurs. Et qui représente désormais 60% de ses ventes. Le régulateur assure que le groupe de Seattle a mis en place des pratiques “illégales” dans le but de “bloquer la concurrence, freiner la croissance des rivaux et consolider sa domination”. Il lui reproche en particulier d’interdire implicitement aux vendeurs d’offrir des tarifs plus bas sur leur propre site ou sur d’autres plateformes, alors même que les commissions qu’il prélève sont les plus importantes du marché. Cela se traduit par des prix “artificiellement plus élevés” sur tous les sites. Et empêche l’émergence de véritables concurrents, capables de court-circuiter Amazon sur les prix.

“Peur constante” – Officiellement, la société n’impose plus de clause tarifaire depuis 2019. Dans les faits cependant, avance la FTC, elle dispose de sanctions qui dissuadent les vendeurs tiers d’offrir des prix plus bas ailleurs. Par exemple, ces derniers peuvent être exclus de la “boîte d’achat”, le bouton jaune qui permet d’acheter directement un produit. Ou alors apparaître beaucoup plus bas dans les résultats de recherche. Selon la FTC, les dirigeants d’Amazon reconnaissent, en interne, que les marchands vivent “dans une peur constante” de sanctions qui feraient plonger leurs ventes. Le régulateur estime aussi que le groupe pousse les vendeurs à acheter de la publicité afin d’être visibles. Et à souscrire à son offre de logistique (FBA), leur permettant d’être éligibles à la livraison gratuite en deux jours.

Algorithme secret – La FTC met aussi en avant un projet secret, connu en interne sous le nom de Nessie. Il s’agissait d’un algorithme informatique lui permettant d’optimiser ses prix à la hausse. Concrètement, celui-ci devait apprendre à connaître puis à influencer les mécanismes de fixation des prix des concurrents. Cela lui permettait de prédire si ces derniers allaient suivre des augmentations de tarifs sur certains produits. Et ainsi de ne réaliser que celles qui présentaient le moins de risque d’une perte de compétitivité. Pour la FTC, cet algorithme aurait fait perdre plus d’un milliard de dollars aux consommateurs américains. S’il n’est qu’un élément parmi d’autres, le projet Nessie pourrait jouer un rôle central pour démontrer le préjudice subi par le public, un élément primordial dans les lois antitrust américaines.

Pour aller plus loin:
– Comment un algorithme secret a rapporté un milliard de dollars à Amazon
– Comment Amazon va éviter une lourde amende en Europe


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