Par , publié le 7 décembre 2022

Amazon ne paiera pas de lourde amende en Europe, où il était ciblé depuis trois ans par deux enquêtes pour abus de position dominante. Selon le Financial Times, le géant américain du commerce en ligne vient en effet de trouver un compromis avec Bruxelles, s’engageant à changer certaines de ses pratiques sur le continent. Cette stratégie est assez inhabituelle. Généralement, les multinationales préfèrent contester les accusations des autorités de la concurrence. Et faire traîner les choses, en multipliant les recours judiciaires. Si Amazon a choisi de prendre les devants, ce n’est pas seulement pour éviter une sanction financière. C’est aussi parce que ses concessions auraient, de toute façon, dû être mises en place dans le cadre du prochain Digital Markets Act.

Double casquette – La première accusation de Bruxelles, qui avait débouché sur l’ouverture d’une procédure antitrust fin 2020, reposait sur le rôle double d’Amazon, à la fois détaillant et place de marché (marketplace), permettant à des vendeurs tiers de proposer des produits sur son site. Selon la Commission, cette double casquette lui permet de se livrer à des pratiques anticoncurrentielles: en analysant la gigantesque quantité de données à sa disposition (chiffre de vente, prix, nombre de visites…), la société peut identifier les articles qui ont le plus de succès. Elle peut alors les commercialiser directement au bon prix, court-circuitant les vendeurs tiers et ne prenant pas le risque de stocker des articles qui ne trouveront pas preneurs.

“Boîte d’achat” – La deuxième enquête ouverte par Bruxelles était centrée autour de la “boîte d’achat”, le bouton jaune placé à droite qui permet d’acheter directement un produit. La Commission cherchait à savoir comment est sélectionné le vendeur qui y apparaît – et qui s’accapare la très grande majorité des ventes car peu d’acheteurs consultent les autres offres. Plus particulièrement, elle souhaitait déterminer si Amazon favorise les produits qu’elle commercialise directement, ou ceux proposés par les marchands clients de ses services de logistique et de livraison (FBA, “expédié par Amazon” en français). Deux cas de figure qui représenteraient une entorse à la concurrence. Moins avancé, ce volet n’avait pas encore fait l’objet d’une procédure antitrust formelle.

“Améliorations” – Pour éviter une amende de la Commission, qui aurait pu aller jusqu’à 10% de son chiffre d’affaires mondial dans chaque affaire, Amazon s’engage à ne plus utiliser les données collectées sur les vendeurs tiers pour son activité de détaillant. Et à assurer un traitement équitable à tous les vendeurs dans le processus de sélection de la “boîte d’achat”. Ces deux concessions ne seront valables que pour une durée de cinq ans. Le groupe va mettre en place un comité de surveillance, mais celui-ci n’aura pas le pouvoir d’imposer des changements. Ces remèdes avaient été jugés “légers, vagues et remplis de failles” par plusieurs organisations. Pas suffisant cependant pour convaincre Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la concurrence, qui va pouvoir refermer l’un des nombreux dossiers ouverts contre les géants américains du numérique.

Pour aller plus loin:
– L’Europe s’accorde sur la régulation des géants du numérique
– Bruxelles autorise Amazon à racheter les studios MGM


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