Par , publié le 5 novembre 2024

L’étau se resserre autour de Temu. La semaine dernière, la Commission européenne a en effet ouvert une procédure formelle contre la plateforme chinoise de shopping à prix cassés. Celle-ci devra déterminer si cette dernière respecte bien le Digital Services Act européen, officiellement entré en vigueur l’été dernier. En cas d’infraction, la société risque une amende pouvant aller jusqu’à 6% de son chiffre mondial. Elle pourrait aussi se voir imposer des mesures correctives. Avant potentiellement d’être interdite sur le continent. Deux éléments seront particulièrement étudiés par les services bruxellois. D’abord, la vente de produits illégaux, contre laquelle des mesures doivent être prises. Ensuite, les mécanismes addictifs, qui pourraient avoir des “conséquences négatives sur le bien-être physique et mental des utilisateurs”.

Dépenses publicitaires – Lancé en 2022 aux États-Unis, Temu a débarqué en Europe l’an passé. Avec succès: elle vient d’y dépasser la barre des 75 millions d’utilisateurs actifs mensuels. La filiale du groupe chinois Pinduoduo reprend le principe du cross-border: les produits, vendus par des marchands tiers, sont expédiés directement depuis des entrepôts chinois. Cela permet de limiter les coûts, mais se traduit aussi par des délais de livraison rallongés. Son succès repose sur trois piliers. D’abord, un immense catalogue de vêtements, ustensiles de cuisine ou accessoires électroniques à petits prix. Ensuite, d’importantes dépenses publicitaires. Et enfin, la gamification, qui a fait ses preuves sur Pinduoduo: l’application propose des mini-jeux pour gagner des bons de réduction, notamment en invitant des amis à s’inscrire.

Laxisme – Déjà soumis aux règles les moins sévères du DSA, appelées les “obligations générales”, Temu doit aussi respecter de nouvelles obligations depuis fin septembre, suite à sa désignation au printemps comme “très grande plateforme”. En particulier, l’e-marchand doit mettre en place des “mesures d’atténuation” pour limiter les risques de vente de contrefaçons, de produits réglementés, de produits dangereux ou qui ne respectent pas les normes européennes. Autant d’articles présents en nombre dans son immense catalogue, selon plusieurs études et articles de presse. Bruxelles indique notamment vouloir examiner les mécanismes permettant d’empêcher la “réapparition” de produits illicites ou de vendeurs ne respectant pas les règles. Autrement dit: la Commission demande à Temu de mettre un terme à sa politique trop laxiste.

Dark patterns – La Commission veut aussi étudier l’impact des mini-jeux, qui pourraient alimenter des comportements addictifs. Elle rappelle aussi à la société qu’elle doit proposer une version dépourvue d’un système de recommandation basé sur le profil des acheteurs. Et aussi permettre aux chercheurs d’accéder à ses données. En revanche, la procédure formelle ouverte contre Temu ne mentionne plus deux autres éléments, qui figuraient dans la demande d’informations envoyée début octobre. D’une part, la traçabilité des vendeurs, avec l’obligation de communiquer leurs adresses et numéros de téléphone. D’autre part, l’utilisation d’interfaces trompeuses (dark patterns), comme de faux compteurs de temps ou de prétendus stocks limités. Ces deux éléments font cependant l’objet d’une plainte du Bureau européen des unions de consommateurs.

Pour aller plus loin:
– Temu et Shein menacés de perdre leur exemption douanière
– Bousculé sur les prix, Amazon reprend les recettes de Shein et Temu


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