Par , publié le 22 janvier 2025

Elles sont le nouvel or noir. Et une nouvelle arme géopolitique pour les États-Unis. La semaine dernière, lors de ses derniers jours au pouvoir, l’administration Biden a accentué les restrictions d’exportation pour les puces dédiées à l’intelligence artificielle générative. Leur portée est sans précédent: elles ne visent plus seulement les pays ennemis, comme la Chine, ciblée depuis l’automne 2023 par de sévères limitations. Elles imposent aussi des quotas à la majorité des pays, dont une partie de l’Union européenne, limitant potentiellement leur capacité à se doter de la puissance de calcul dont ils ont besoin. Et donnant à Washington un puissant moyen de pression diplomatique. À moins que Donald Trump, de retour à la Maison Blanche, change de cap, pour satisfaire Nvidia et Oracle, vent debout contre ces mesures.

Puces américaines – Depuis le lancement de ChatGPT fin 2022, les cartes graphiques (GPU) sont devenues capitales. Elles permettent en effet d’entraîner et de faire tourner les derniers modèles d’IA. Elles sont presque exclusivement conçues par des acteurs américains, en particulier Nvidia, le leader incontesté du marché. Cette hégémonie permet aux États-Unis de contrôler, ou au moins de limiter, l’accès aux dernières avancées technologiques. En 2022, l’administration Biden avait ainsi imposé des restrictions sur les exportations des puces les plus puissantes vers la Chine, se justifiant par la volonté d’éviter que des technologies américaines ne soient utilisées pour renforcer la puissance militaire de Pékin. Ces sanctions ont ensuite été durcies à plusieurs reprises pour refermer certaines failles qui limitaient leur efficacité.

Trois catégories – Dans la nouvelle réglementation, rien ne change pour les 23 pays considérés comme une menace, comme la Chine, la Russie, l’Iran ou encore la Corée du Nord, qui ne peuvent toujours pas acheter les GPU américains les plus avancés. À l’opposé, rien ne change également pour les nations considérées comme alliées, qui ne sont visées par aucune restriction. Cette liste n’inclut que 18 noms, dont la France. Tous les autres pays seront désormais soumis à des quotas. C’est le cas de 17 des 27 membres de l’Union européenne, mais aussi d’Israël, de l’Arabie saoudite et de l’Inde. À partir de cette année, ils ne pourront acheter que l’équivalent de 50.000 H100, le GPU de référence de Nvidia. Et 100.000 s’ils signent un accord de sécurité technologique. Cette limite représentera un nombre très restreint d’exemplaires des prochains accélérateurs de Nvidia.

Une arme pour Trump ? – Plusieurs exceptions sont prévues, notamment pour les plateformes américaines de cloud qui souhaitent ouvrir des data centers. Mais de nombreuses capitales s’inquiètent de l’impact de ces mesures sur leur compétitivité technologique. D’autres se demandent si l’administration Trump ne va pas être tentée d’utiliser cette réglementation pour obtenir ce qu’elle souhaite. Par exemple, en menaçant un pays allié d’être rétrogradé ou à l’inverse en promettant la fin des quotas. Cela représenterait un atout pour le nouveau président américain, qui souhaite redéfinir les relations internationales. Mais il n’est pas encore certain qu’il décide d’appliquer ces nouvelles règles, qui pénaliseraient aussi les groupes américains. Et qui pourraient favoriser l’émergence de rivaux étrangers. Voire renforcer les acteurs chinois.

Pour aller plus loin:
– Face aux progrès chinois, les États-Unis accentuent leurs sanctions
Comment Huawei déjoue les sanctions américaines


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