En vingt ans, YouTube a bâti son immense succès sur sa gratuité. Pourtant, la plateforme de vidéo a aussi réussi à imposer des abonnements payants auprès de ses utilisateurs. Si les débuts ont été mouvementés, ses offres Premium et Music viennent ainsi de dépasser la barre des 125 millions de clients – en comptant ceux qui sont encore dans la période d’essai. C’est autant que Disney+. Sur les treize derniers mois, elles ont attiré 25 millions d’abonnés supplémentaires. À titre de comparaison, Spotify en a gagné 27 millions en 2024. Une réussite que “beaucoup considéraient comme impossible”, savoure Lyor Cohen, le responsable de YouTube Music. Recruté en 2016, l’ancien patron de la maison de disques Warner Music a joué un rôle primordial, notamment en remettant de l’ordre dans une politique commerciale particulièrement confuse.
Pas de publicités – YouTube a lancé son premier abonnement en 2014. Baptisé Music Key, celui-ci permet de regarder des clips musicaux sans publicité. Il cohabite avec une plateforme de streaming musical, commercialisée par Google, sa maison mère. Ce genre de doublon est alors courant au sein du groupe de Mountain View pour jongler entre les stratégies de ses différentes équipes. Ces deux offres sont ensuite réunies au sein de YouTube Music, qui propose à la fois des clips et des pistes audios. Le deuxième abonnement est lancé en 2015. D’abord appelé Red puis renommé Premium, il inclut l’offre musicale, retire les publicités sur l’ensemble du catalogue et permet de bénéficier de fonctionnalités additionnelles – comme la possibilité de télécharger des vidéos ou de les regarder dans une fenêtre flottante tout en utilisant une autre application.
Accélération – Les offres payantes de YouTube ont mis du temps à trouver leur public, car il est toujours très compliqué de convaincre des utilisateurs de payer pour une offre à laquelle ils ont pris l’habitude d’accéder gratuitement. Au départ, la plateforme mettait surtout en avant des vidéos réservées aux abonnés. Mais celles-ci n’ont jamais trouvé leur public. En 2020, six ans après leur lancement, les abonnements ne comptent ainsi que 30 millions de clients. La croissance s’accélère rapidement ensuite, peut-être portée par la crise sanitaire. Cette évolution coïncide aussi avec l’arrivée de l’option fenêtre flottante sur les iPhone, qui renforce la proposition de valeur. Plus récemment, la grande offensive de YouTube contre les bloqueurs de publicité semble avoir joué un rôle: le rythme de conquête d’abonnés a progressé depuis.
Nouvelle offre – YouTube profite aussi de son positionnement tarifaire. À 13 euros par mois, son abonnement Premium ne coûte que deux euros de plus que Spotify. En plus d’un catalogue de chansons tout aussi étoffé, il permet donc de bénéficier des autres avantages à petit prix. La société ne précise pas la répartition des abonnés entre ses deux offres. Elle vient par ailleurs de lancer une version allégée, baptisée Premium Lite et commercialisée à 8 dollars par mois aux États-Unis, soit 6 dollars de moins. Celle-ci ne donne pas accès à YouTube Music, ni aux fonctionnalités additionnelles. En abaissant le prix d’entrée, YouTube espère attirer de nouveaux clients. Puis, les convaincre de payer encore plus. “Lors de nos essais, nous avons constaté que plus de membres Lite passaient à YouTube Premium que l’inverse”, assure Lyor Cohen.
Pour aller plus loin:
– YouTube accentue son offensive contre les bloqueurs de publicité
– Aux États-Unis, YouTube et Facebook conservent leur protection juridique