C’est une petite phrase qui a fait vaciller Google en Bourse. Et qui permet de comprendre pourquoi le géant de Mountain View se bat pour continuer à verser plus de 20 milliards de dollars par an à Apple. La semaine dernière, Eddy Cue a indiqué que le groupe à la pomme étudiait “activement” la possibilité d’intégrer des services d’intelligence artificielle générative au sein de son navigateur Safari. “Avant l’IA, les alternatives ne me semblaient pas crédibles, a expliqué le responsable des services d’Apple. Aujourd’hui, le potentiel est bien plus grand, car de nouveaux acteurs abordent le problème différemment”. Un tel changement mettrait fin au partenariat exclusif permettant à Google d’être le moteur par défaut de Safari. Et il pourrait accélérer la potentielle transition vers des concurrents dopés à l’IA, comme ChatGPT Search ou Perplexity.
Abus de position dominante – Les déclarations d’Eddy Cue ont été faites à la barre d’un tribunal américain, où vient de se terminer un procès devant déterminer des mesures correctives contre Google. L’été dernier, la société a en effet été reconnue coupable d’abus de position dominante dans la recherche en ligne, notamment en raison de son accord avec Apple, qui lui permet de capter l’immense majorité des recherches effectuées sur les iPhone. Pour relancer la concurrence, le gouvernement américain réclame en particulier la vente de Chrome, le navigateur maison. Mais il souhaite aussi interdire les partenariats commerciaux avec des navigateurs concurrents ou des fabricants de smartphones. Le verdict est attendu en août. Son entrée en vigueur ne devrait cependant pas être effective avant plusieurs années, jusqu’à l’aboutissement de la procédure d’appel.
Nouveaux usages – Si cela peut paraître paradoxal, la somme faramineuse versée à Apple est une bonne affaire pour Google. C’est le prix à payer pour consolider sa position quasi monopolistique dans la recherche en ligne. Tout changement ouvrirait alors la porte à des concurrents. D’autant que l’IA générative transforme profondément les usages. Les chatbots représentent désormais une alternative aux moteurs traditionnels. Ils peuvent trouver des informations sur Internet pour les combiner avec la puissance de l’IA, remplaçant ainsi les liens ou les petits extraits par des réponses plus complexes et détaillées. Leur interface conversationnelle représente aussi un avantage, permettant aux internautes de demander des précisions ou de rebondir sur certains éléments. En outre, ces services doivent être au cœur du renouveau des assistants vocaux.
Baisse des recherches – Selon Eddy Cue, le nombre de recherches sur Safari a ainsi reculé en avril, “pour la première fois en plus de vingt ans”. Sans démentir, Google assure continuer “d’observer une croissance globale du volume de requêtes”, y compris sur les terminaux d’Apple. La société a cependant bien conscience du danger. Prise de court par le lancement de ChatGPT fin 2022, elle a depuis ajouté des réponses fournies par l’IA sur sa page de résultats pour certaines questions. Elle peut aussi compter sur sa puissance financière pour s’assurer que son application d’IA Gemini soit préinstallée sur les smartphones Android. Elle négocie aussi un accord avec Apple, pour que son modèle soit intégré dans l’assistant Siri. Mais l’IA représente un autre danger: le déclin du modèle de liens sponsorisés qui fait la force de la machine publicitaire.
Pour aller plus loin:
– Moment de vérité pour Google, qui tente d’éviter une vente forcée de Chrome
– Avec ChatGPT Search, OpenAI part à l’assaut de Google