Mistral AI ne se voit plus seulement en alternative européenne à OpenAI, Anthropic ou encore DeepSeek. La start-up française spécialisée dans l’intelligence artificielle générative rêve aussi de devenir une alternative à Amazon Web Services, Microsoft Azure et Google Cloud. Mercredi, elle a ainsi annoncé le lancement de sa propre plateforme de cloud computing. Baptisée Compute, celle-ci sera couplée à une couche logicielle qui doit permettre aux entreprises de développer et de déployer rapidement des services d’IA. Pour crédibiliser cet ambitieux projet, Mistral insiste sur ses liens avec Nvidia, qu’elle présente comme un partenaire. Dans les faits, le rôle du géant américain pourrait se limiter à la fourniture de 18.000 super puces GB200, le GPU le plus puissant de sa gamme dédiée à l’IA. Une capacité de calcul inégalée pour un acteur européen.
Souveraineté – Mistral met aussi en avant l’expérience accumulée depuis son lancement il y a deux ans. “Nous avons passé la majeure partie de notre temps à opérer des GPU et à bâtir une plateforme permettant de créer des applications”, souligne Arthur Mensch, son directeur général, qui s’exprimait lors du salon Vivatech aux côtés de… Jensen Huang, le patron de Nvidia. Mais son meilleur argument de vente reste les débats autour de la souveraineté technologique – comme pour ses grands modèles de langage. Les administrations et les entreprises du continent “ont besoin d’une solution européenne”, assure-t-il. Or, aucun cloud européen ne rivalise, jusqu’à présent, véritablement avec les géants américains, aussi bien en termes de puissance de calcul que d’offre logicielle. Orange, BNP Paribas et le laboratoire Kyutai feront partie des premiers clients.
Financement – Concrètement, Mistral va construire un data center à une trentaine de kilomètres au sud de Paris, dont la capacité pourra ensuite être augmentée. L’entrée en service est espérée début 2026. La start-up précise que les clients de son cloud pourront utiliser d’autres modèles open source que les siens, mais pas des modèles payants. Le mystère demeure sur le financement. À elle seule, la facture pour les 18.000 GPU de Nvidia dépasse en effet la barre du milliard de dollars. C’est autant que l’ensemble des fonds récoltés par Mistral depuis ses débuts au printemps 2023. Une nouvelle levée, d’un montant d’un milliard de dollars, pourrait intervenir en fin d’année. Peut-être auprès de Nvidia, qui a déjà investi dans la plateforme américaine CoreWeave. “Nous adorerions pouvoir financer une entreprise comme Mistral”, indique Jensen Huang.
Nombreux contrats – En se lançant dans le cloud, la start-up lorgne non seulement un relais de croissance de son chiffre d’affaires, mais aussi une activité aux marges élevées. Selon Arthur Mensch, elle se rapproche de la barre des 100 millions de dollars de recettes en rythme annualisé. C’est trois fois plus que fin 2024… mais cent fois moins qu’OpenAI. En réalité, Mistral ne boxe pas dans la même catégorie que le concepteur de ChatGPT. Son objectif n’est pas de proposer des modèles aussi puissants que les grands groupes américains, mais d’offrir des modèles suffisamment compétitifs pour représenter une alternative crédible. Ces derniers mois, elle a ainsi multiplié les accords commerciaux avec de grands groupes français, pour des raisons de souveraineté, mais aussi d’image – il est désormais bien vu de s’associer avec le champion tricolore du secteur.
Pour aller plus loin:
– Avec sa dernière levée de fonds, Mistral AI s’installe tout en haut de la French Tech
– Entre potentiel de l’IA et endettement massif, le pari très risqué de CoreWeave