Par , publié le 17 octobre 2024

Dans la ruée vers l’or de l’intelligence artificielle générative, ASML fabrique les outils qui permettent de produire des pelles et des pioches. Ses machines de lithographie, sont en effet les seules à pouvoir graver les cartes graphiques de Nvidia, indispensables pour entraîner et faire tourner les derniers modèles. Pourtant, le groupe néerlandais n’affiche pas une santé financière insolente, à l’inverse du géant américain, proche de devenir la première capitalisation boursière mondiale. Mardi, il a ainsi abaissé ses prévisions de chiffre d’affaires pour 2025. Et il a fait état de prises de commandes deux fois plus faibles qu’attendu au troisième trimestre. “Malgré le potentiel de croissance dans l’IA, d’autres segments mettent plus de temps à se redresser”, reconnaît Christophe Fouquet, le nouveau patron français d’ASML.

Ultraviolet extrême – Fondée en 1984 à Veldhoven, dans la banlieue d’Eindhoven, la société néerlandaise est devenue un chaînon indispensable sur le secteur des semi-conducteurs. Non seulement elle contrôle plus de 60% du marché, devançant très nettement ses rivales japonaises Nikon et Canon. Mais elle possède aussi une position de monopole pour les composants avancés, aux gravures les plus fines, grâce à la lithographie par rayonnement ultraviolet extrême (EUV en anglais), une technique qu’elle est encore la seule à maîtriser. Les puces les plus sophistiquées, des processeurs d’iPhone aux derniers GPU, sont ainsi gravées par ses machines-outils. En cinq ans, son chiffre d’affaires a plus que doublé, atteignant 27,6 milliards d’euros en 2023. Une dynamique que l’essor de l’IA générative devait prolonger, voire accélérer.

Stocks élevés – En début d’année, ASML anticipait ainsi une croissance “significative” de son activité en 2025, pouvant dépasser les 40%. Elle se chiffrera au mieux à 25%. Cet optimisme était motivé par la demande pour les GPU dédiés à l’IA. Et par le rebond de la production sur les autres segments, longtemps pénalisés par le niveau trop élevé des stocks. “La reprise sera plus graduelle que nous le pensions”, admet désormais Christophe Fouquet. Certes, la situation s’est améliorée pour les puces mémoire, en particulier grâce aux derniers modèles dédiés à l’IA. Mais la demande pour les composants destinés à l’automobile et à l’industrie reste faible. Cela signifie que les usines ne tournent pas à plein régime, ce qui n’incite pas les fondeurs à augmenter leurs capacités de production. Et donc à commander des machines chez ASML.

Ventes en Chine – Dans le même temps, les fondeurs ont perfectionné leurs processus industriels, réduisant le nombre d’étapes nécessitant d’utiliser les outils néerlandais. Les pronostics de la société se heurtent aussi aux difficultés d’Intel et de Samsung, qui avaient prévu d’investir massivement pour accroître leurs capacités. Le groupe américain vient notamment de repousser la construction de sa méga-usine allemande. ASML va également faire les frais des tensions géopolitiques. Sous la pression des États-Unis, les Pays-Bas ont en effet renforcé les restrictions d’exportation de ses machines vers la Chine. L’an prochain, ses ventes dans le pays pourraient plonger de plus de 30%, anticipent les analystes d’UBS. Autre inquiétude: l’intérêt des fondeurs pour son dernier modèle, qui affiche un prix catalogue de 350 millions d’euros.

Pour aller plus loin:
– Mécontente aux Pays-Bas, ASML menace d’ouvrir des usines en France
– Après l’échec de son plan de relance, Intel va lancer un plan de sauvetage


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