C’est une victoire diplomatique pour les États-Unis. Et un revers majeur pour la Chine. Vendredi, après plusieurs mois de négociations, les Pays-Bas et le Japon ont finalement accepté de s’aligner sur les dernières sanctions américaines, interdisant l’exportation vers le marché chinois des équipements nécessaires à la production des puces les plus avancées. Cet accord, révélé par la presse américaine mais pas officiellement confirmé, devrait prendre plusieurs mois avant d’entrer en vigueur. Il représente un coup de massue pour les ambitions de Pékin, qui espère toujours se libérer de sa dépendance sur le marché des semi-conducteurs. Et dont la plainte déposée fin 2022 devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ne devrait rien changer.
“Sécurité nationale” – Les premières sanctions américaines ont été imposées en 2020 par l’administration Trump. Elles ciblaient des entreprises soupçonnées d’entretenir des liens étroits avec l’armée chinoise, dont Huawei et SMIC. Les mesures mises en place en octobre 2022 par l’administration Biden sont beaucoup plus larges. Elles interdisent aux entreprises américaines d’exporter vers la Chine des puces avancées et les équipements permettant de les produire, sans autorisation préalable du gouvernement. Ces restrictions s’appliquent également aux groupes étrangers, dès lors qu’ils utilisent des technologies ou des équipements américains. Washington explique vouloir protéger sa “sécurité nationale”, ce qui lui permet de se placer théoriquement à l’abri d’une condamnation de l’OMC.
Pressions américaines – Les fabricants chinois de semi-conducteurs ne peuvent plus s’approvisionner auprès des équipementiers américains, comme Applied Materials, Lam Research et KLA. Un moindre mal car ils pouvaient toujours se tourner vers d’autres fournisseurs. En particulier, le néerlandais ASML, premier fabricant mondial de machines de photolithographie et le seul à maîtriser la technique de lithographie par rayonnement ultraviolet extrême, indispensable pour réaliser les gravures les plus fines. Ou encore les japonais Nikon, principal rival d’ASML, et surtout Tokyo Electron, qui conçoit des machines essentielles en amont et en aval du processus de gravure. Ces derniers mois, Washington a donc fortement fait pression sur La Hague et Tokyo pour qu’ils suivent sa voie.
Subventions – Sans équipements étrangers, la Chine ne pourra pas remplir ses objectifs de production. Ni monter en gamme pour fabriquer les puces avancées que les entreprises chinoises ne peuvent désormais plus acheter auprès de quasiment tous les fabricants mondiaux. Face à ce risque, le régime prépare un plan massif de subventions et de crédits d’impôt pour aider son industrie des semi-conducteurs, avance l’agence Reuters. Celui-ci pourrait se chiffrer à 1.000 milliards de yuans (136 milliards d’euros). Et visera notamment à faire progresser les équipementiers, qui comptent des années de retard sur leurs rivaux. “Impossible que la Chine puisse bâtir une industrie de pointe par elle-même”, estime cependant Stacy Rasgon, analyste chez Bernstein, interrogé par Bloomberg.
Pour aller plus loin:
– ASML, le géant européen inconnu des semi-conducteurs
– L’Europe veut investir 43 milliards d’euros dans les puces