Par , publié le 20 novembre 2020

Et si les 8,2 milliards d’euros d’amendes infligées à Google n’avaient servi à rien ? Dans un rapport publié jeudi, la Cour des comptes européenne remet en cause l’efficacité des lourdes sanctions financières imposées ces dernières années par Bruxelles pour abus de position dominante. Entre 2017 et 2019, le moteur de recherche américain a été condamné à trois reprises, en raison de pratiques jugées anticoncurrentielles. Mais la Commission “n’a jamais évalué l’effet dissuasif” de ses amendes, regrette l’organisme basé au Luxembourg. Et de souligner que les sanctions ne doivent pas être une finalité, mais un outil.

Remèdes inefficaces – Pour les rivaux de Google, ce constat n’est pas nouveau. Malgré les trois condamnations de la société, ils soulignent régulièrement que la situation ne s’est pas améliorée. Au-delà des amendes – qui ne représentent qu’une petite partie des profits générés par Google -, les remèdes négociés entre la société et la Commission posent aussi problème. Illustration avec le comparateur de prix Google Shopping, sanctionné en 2017. Ses rivaux peuvent désormais participer à des enchères pour apparaître dans cet espace. Mais ce système les oblige à réinvestir une partie importante de leurs marges, dénoncent-ils. Ce qui ne ferait, en réalité, que renforcer la position dominante de l’entreprise américaine.

Moteur de recherche – La situation est similaire sur le marché de la recherche mobile. En 2018, Google s’est vu infliger une amende record de 4,3 milliards d’euros, après s’être servi de son système Android pour favoriser son moteur de recherche. Et ainsi empêcher l’émergence de véritables rivaux. Depuis, le groupe a également mis en place un système d’enchères payantes pour permettre aux utilisateurs d’Android de choisir, parmi quatre options, un moteur par défaut. Avec ce mécanisme, “les alternatives de Google qui participent aux enchères doivent lui donner la plupart de leurs bénéfices”, dénonce le moteur DuckDuckGo. La part de marché de Google, elle, n’a pas baissé.

Changement de philosophie – Au-delà de l’absence de suivi, la Cour des comptes européenne reconnaît que la tâche de la Commission est difficile. D’abord, parce que les enquêtes antitrust sont aussi complexes que longues: sept ans par exemple dans le cadre de Google Shopping. Ensuite, parce qu’elle “ne dispose actuellement d’aucun outil qui lui permettrait d’intervenir en amont”. Dans ce cadre, le Digital Services Act devrait changer la donne. Ce texte, qui sera officiellement présenté le 2 décembre, doit en effet doter Bruxelles d’armes adaptées pour lutter contre la domination des géants technologiques américains. Sans attendre de pouvoir constater une pratique qui pourrait constituer une infraction.

Pour aller plus loin:
– Comment l’Europe veut lutter contre la domination des Gafa
– Les Etats-Unis lancent une procédure antitrust contre Google


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