Par , publié le 20 octobre 2020

Après plus d’un an d’enquête, les autorités américaines dégainent enfin. Mardi, le département de la Justice (DOJ) a officiellement lancé une procédure antitrust contre Google, accusant le moteur de recherche d’utiliser des méthodes illégales pour maintenir sa position dominante. Ces poursuites, les plus importantes depuis celles visant Microsoft en 1998, pourraient bien ne pas être les dernières: Apple, Facebook et Amazon sont également dans le collimateur. “Google est un monopole qui doit être stoppé”, justifie le DOJ. L’accusé dénonce, lui, une plainte “biaisée”. “Les gens utilisent Google, parce qu’ils choisissent de le faire, pas parce qu’ils y sont forcés ou n’ont pas d’alternative”, assure-t-il.

Moteur par défaut – Le spectre de la procédure reste cependant assez limité, peut-être pour pouvoir l’annoncer avant les élections du 3 novembre. Le DOJ reproche d’abord à Google d’imposer son moteur de recherche aux fabricants de smartphones tournant sous Android, son système d’exploitation mobile. Il lui reproche ensuite l’accord signé avec Apple pour être le moteur par défaut du navigateur Safari. Un accord se chiffrant à plus de 8 milliards de dollars par an. La société profiterait ainsi de la position dominante d’Android et de sa puissance financière pour empêcher l’émergence de véritables rivaux. Aux États-Unis, Google s’accapare ainsi 94% des recherches mobiles, soulignent les autorités.

Défense bancale – Cet argumentaire, qui rappelle celui utilisé contre Microsoft, a déjà été en partie employé par la Commission européenne, lorsqu’elle avait sanctionné Google d’une amende de 4,3 milliards d’euros. Depuis, les utilisateurs européens d’Android doivent choisir le moteur de recherche par défaut lors de la configuration de leur smartphone. Ils ont le choix entre quatre options, dont Google, déterminées par un processus d’enchères, lui aussi décrié. Pour défendre ses pratiques, l’entreprise note qu’il est facile de changer le moteur par défaut. Et elle assure que les gens souhaitent de toute façon utiliser ses services. Mais dans ce cas là, pourquoi verser des milliards de dollars par an pour s’assurer une place de choix ?

Plusieurs années – L’officialisation de cette procédure n’est que le début d’un feuilleton qui pourrait durer de longues années. Initiées en 1998, les poursuites contre Microsoft n’avaient en effet pris fin que quatre ans plus tard. Il est par ailleurs peu probable que la possible élection de Joe Biden en novembre n’entraîne un retrait de la plainte. Pour Google, l’enjeu dépasse ces simples accusations. Une défaite pourrait en effet ouvrir la voie à d’autres poursuites aux États-Unis, ou dans d’autres pays. La société est d’ailleurs toujours dans le viseur de la justice de plusieurs Etats américains, dont sa Californie natale. A l’opposé, une victoire constituerait un coup d’arrêt majeur pour les autorités antitrust américaines. Contre Google, mais aussi contre les autres géants du numérique.

Rapport du Congrès – L’action du DOJ témoigne d’un changement brutal du climat politique autour de ces entreprises. En 2013, Google avait déjà été inquiété par la Federal Trade Commission, le gendarme américain de la concurrence. Mais celle-ci avait classé l’affaire sans suite, une décision qui a depuis été fortement critiquée. Trois autres enquêtes sont en cours: elles ciblent Apple, Amazon et Facebook. Au Congrès, une commission parlementaire a conclu, début octobre, que ces sociétés agissaient de manière anti-concurrentielle. Elle recommandait des mesures chocs, pouvant aller jusqu’au démantèlement. En Europe, la Commission travaille également sur un nouveau cadre réglementaire pour renforcer la concurrence.

Pour aller pour loin:
– Comment l’Europe veut lutter contre la domination des Gafa
– En Inde, des start-up se révoltent contre Google


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