Par , publié le 20 novembre 2023

Xavier Niel a choisi de faire l’annonce en famille, à Station F, l’immense incubateur de start-up qu’il a financé à Paris, lors d’un événement organisé par Scaleway, l’ancien hébergeur reconverti en plateforme de cloud de son groupe Iliad. Et sur scène, à ses côtés, deux “amis incroyables”: Eric Schmidt, l’ancien directeur général de Google devenu depuis philanthrope, et Rodolphe Saadé, le patron de l’armateur marseillais CMA CGM, qui a participé en juin à la levée de fonds menée par Mistral AI, la nouvelle start-up vedette de l’IA en France. Vendredi, le fondateur de Free a dévoilé Kyutai, un laboratoire de recherche à but non lucratif dédié à l’intelligence artificielle générative et financé, à parts égales, par les trois milliardaires à hauteur de 300 millions d’euros. Une initiative qui rappelle les débuts d’OpenAI.

Open science – Kyutai, dont le nom signifie sphère en japonais, a déjà recruté une équipe de six chercheurs, tous formés dans de grandes écoles françaises. “Notre principale mission est de bâtir et de démocratiser une intelligence artificielle générale (capable d’apprendre et réaliser n’importe quelle tâche, ndlr) grâce à l’open science”, explique son directeur Patrick Pérez, qui dirigeait jusqu’à maintenant le laboratoire d’IA de l’équipementier automobile Valeo. Concrètement, Kyutai va lancer “des projets de recherche extrêmement ambitieux”, puis partagera les résultats avec la communauté scientifique et avec les entreprises et start-up, qui pourront utiliser librement ses avancées. Le laboratoire souhaite aussi “former la prochaine génération d’experts”, en accueillant des étudiants dans ses équipes.

Articles scientifiques – Kyutai a déjà débauché trois chercheurs chez FAIR, le centre de recherche de Meta. Et deux chez Deepmind, la filiale de Google. Xavier Niel ambitionne d’attirer “les meilleurs talents français”. Pour cela, il met en avant la possibilité d’œuvrer pour le “bien commun”, et pas seulement pour les profits des géants américains, en permettant à ses équipes de publier des articles scientifiques. La possibilité de participer au champ académique est très prisée par les chercheurs dans le domaine de l’IA. Mais les entreprises du secteur rechignent de plus en plus à partager leurs avancées dans la recherche, avant d’avoir pu en exploiter le potentiel. C’est le cas en particulier de Google, dont les travaux sur le réseau de neurones Transformer ont joué un rôle primordial dans l’émergence de ChatGPT.

Enveloppe limitée – En jouant la carte de l’open science, Kyutai pourrait profiter d’un avantage dans la course aux meilleurs experts. Mais pourra-t-il rivaliser face aux géants américains qui offrent des salaires annuel à six chiffres ? Xavier Niel assure que le laboratoire offrira des rémunérations compétitives. Sur le papier son enveloppe de 300 millions d’euros est importante, mais elle ne devrait suffire qu’à financer les premières années de fonctionnement. Au-delà des salaires, entraîner des modèles d’IA coûte en effet extrêmement cher – même si Scaleway promet de lui facturer à prix coûtant l’utilisation de supercalculateur Nabu. Le fondateur de Free espère attirer d’autres soutiens financiers, indispensables pour ne pas succomber à la tentation commerciale. En 2019, OpenAI avait, lui, abandonné son but non lucratif.

Pour aller plus loin:
– Les coûts de l’IA menacent de freiner son adoption
– La start-up française Mistral AI lance sa première IA générative


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