Par , publié le 3 décembre 2023

Un mois à peine après son lancement, l’abonnement payant de Meta, la maison mère de Facebook et d’Instagram, est déjà ciblé par deux plaintes, l’accusant de ne pas respecter le Règlement général sur la protection des données (RGPD). La première a été déposée par l’association Noyb, menée par l’activiste autrichien Max Schrems, à l’origine de l’invalidation du Privacy Shield, devant la DSB, la Cnil autrichienne. La deuxième émane du Bureau européen des unions de consommateurs, qui a saisi le réseau européen de protection des consommateurs. Dans les deux cas de figure, les plaignants estiment que le choix offert par le réseau social américain à ses utilisateurs – accepter la publicité ciblée ou payer un abonnement compris entre 10 et 21 euros par mois – n’en est pas vraiment un. Ce qui serait contraire à la législation.

Consentement – L’abonnement payant, qui permet de surfer sur Facebook et Instagram sans aucune publicité, représente la dernière tentative de Meta pour se mettre en conformité avec le RGPD, qui impose de recueillir le consentement avant d’utiliser des données personnelles à des fins publicitaires. La société ne souhaite pas mettre en place un consentement classique, car de nombreux internautes auraient refusé le ciblage, handicapant sa capacité à monétiser son audience. À la place, elle a d’abord ajouté cette disposition dans ses conditions d’utilisation, forçant ses utilisateurs à donner leur autorisation, généralement sans le savoir. Mais cette pratique a été retoquée par les Cnil européennes. Elle a ensuite tenté d’invoquer le principe “d’intérêt légitime”, prévu dans le RGPD. Sans succès.

Conforme au RGPD ? – Contraint de trouver une autre parade, le groupe dirigé par Mark Zuckerberg introduit une nouvelle forme de consentement, qui s’effectue par l’argent: seuls les internautes qui acceptent de payer pourront échapper au ciblage publicitaire. Meta assure que ce dispositif est conforme au RGPD, s’appuyant sur un jugement de la Cour de justice de l’Union européenne, qui “a expressément reconnu qu’un modèle d’abonnement constitue une forme valide de consentement pour un service financé par la publicité”. Dans un dossier similaire – les “cookies wall” –, la Cnil française avait aussi estimé que les “contreparties monétaires” peuvent “constituer une alternative au consentement”, tout en soulignant qu’elles devaient être proposées à un “tarif raisonnable” afin d’offrir un “véritable choix” aux internautes.

“Réservé aux riches” – Ce dernier point est au cœur des plaintes déposées la semaine dernière. Celles-ci estiment que le prix de l’abonnement est démesuré – deux fois plus élevé que les recettes publicitaires par utilisateur européen. Et qu’il n’est donc pas compatible avec la notion de “choix libre” prévue dans le RGPD. Noyb souligne que seulement 3% à 10% des internautes souhaitent des publicités ciblées, mais que 99,9% d’entre eux les acceptent plutôt que de payer une somme de deux euros. Pour Max Schrems, Meta cherche ainsi à réserver un “droit fondamental” aux “riches”. Le Comité européen de la protection des données, qui regroupe tous les régulateurs du continent, dit étudier la question. La Cnil norvégienne, en pointe dans le combat contre le réseau social, a, elle, déjà exprimé de “graves inquiétudes”.

Pour aller plus loin:
– Facebook condamné à une amende record de 1,2 milliard d’euros
– En Europe, le petit jeu du chat et de la souris de Facebook


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