Par , publié le 16 janvier 2024

Révélations explosives ou erreur d’interprétation ? Dans un article publié en fin de semaine dernière, le South China Morning Post affirmait que l’armée chinoise avait établi un “lien physique” avec Baidu dans le domaine de l’intelligence artificielle générative, s’appuyant notamment sur un article scientifique publié fin décembre par un laboratoire de recherche militaire. Mais depuis, cette formulation a été retirée par le quotidien basé à Hong Kong, reconnaissant implicitement son erreur. Qu’importe: l’action du moteur de recherche, qui a fermement démenti ces spéculations, a chuté de plus de 11% lundi. La raison ? Les investisseurs chinois s’inquiètent de potentielles sanctions américaines contre Baidu, qui pourraient avoir un impact conséquent sur son fonctionnement et ses principales activités.

Restrictions d’exportation – Cet épisode pourrait au final n’être qu’anecdotique. Mais il illustre le risque qui pèse sur tous les groupes chinois spécialisés dans l’intelligence artificielle. À tout moment, ils peuvent en effet se retrouver ciblés par Washington, lancé dans une bataille pour empêcher Pékin d’utiliser les progrès technologiques à des fins militaires. À l’automne 2022, la Maison blanche a imposé de sévères restrictions d’exportation vers la Chine des puces les plus avancées, notamment celles qui permettent d’entraîner les derniers modèles d’IA générative, ainsi que des équipements nécessaires à leur production. Ces mesures ont été renforcées l’an passé pour refermer les failles dans lesquelles s’était notamment engouffré Nvidia. Et elles ont été suivies par les Pays-Bas et le Japon.

Prédire les mouvements – L’article scientifique publié par le laboratoire lié à l’armée chinoise pourrait donner de nouveaux arguments aux États-Unis. Celui-ci décrit en effet des tests visant à utiliser de grands modèles de langage dans le processus de décision stratégique. Exemples: prédire les prochains mouvements des troupes ennemies ou déterminer le positionnement idéal des soldats. Les auteurs de l’étude concluent cependant que les modèles grand public ne sont pas encore très utiles dans le domaine. Mais ils soulignent qu’un processus d’entraînement, guidé par des experts militaires, pourrait leur permettre de gagner en efficacité. Deux modèles ont été testés: Ernie, conçu par Baidu, et Spark, développé par iFlyTek, une société spécialisée dans la reconnaissance vocale.

Liste noire – Baidu dément tout lien avec ce laboratoire, et assure ne pas avoir connaissance de son projet de recherche. “Si notre grand modèle de langage a été utilisé, cela a été la version publiquement disponible en ligne”, promet-il. En étant associé à l’armée, le groupe risque de se retrouver dans le collimateur de Washington. Et d’être placé sur une liste noire qui lui interdirait toute relation commerciale avec des entreprises américaines et des entreprises étrangères utilisant des technologies américaines. En perte de vitesse, Baidu a pivoté l’an passé vers l’IA générative. Avec succès: son chatbot Ernie est considéré comme le plus avancé en Chine – où les rivaux occidentaux, comme ChatGPT et Bard de Google, ne sont pas disponibles. La société revendique plus de 100 millions d’utilisateurs par mois.

Pour aller plus loin:
– Malgré les sanctions américaines, Huawei lance de nouvelles puces d’IA
Dans l’IA, Baidu assure “ne pas être inférieur” à ChatGPT


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