Par , publié le 5 mars 2024

L’affaire aura pris du temps. Beaucoup trop de temps aux yeux de Spotify. Lundi, cinq ans après avoir été saisie par la plateforme suédoise de streaming musical, la commission européenne a finalement infligé une lourde amende à Apple, d’un montant de 1,8 milliard d’euros. C’est la première fois que le groupe à la pomme est sanctionné par Bruxelles. Il a été reconnu coupable d’avoir abusé de la position dominante de son système iOS, qui équipe ses iPhones et ses iPad, lui permettant de prélever des commissions sur les abonnements. En cause: la pratique controversée dite d’anti-steering. Une pratique qui devra prendre fin sur le continent. Dans un long communiqué, Apple annonce son intention de faire appel, dénonçant le manque de preuves et rappelant la position de leader du marché de Spotify.

Commissions – Parmi les nombreuses règles de l’App Store, sa boutique d’applications mobiles, la société américaine interdit aux développeurs de rediriger leurs utilisateurs vers un site Internet pour s’abonner à un service payant, ce qui leur permettrait de ne pas lui verser une commission de 15% ou de 30%. Elle leur interdit également d’indiquer qu’il est possible de passer par leur site pour souscrire à une offre. Pour Bruxelles, ces restrictions, “ni nécessaires ni proportionnées”, ont été “préjudiciables” pour les consommateurs, qui ont dû “payer des prix nettement plus élevés” car certains services ont répercuté les commissions d’Apple sur leurs tarifs. Ces pratiques se sont aussi traduites par une “altération de l’expérience des utilisateurs”, en les obligeant à chercher eux-mêmes les meilleurs prix ou le moyen de s’abonner.

Concessions – Face aux multiples critiques et procédures contre le niveau de ses commissions, Apple a multiplié les concessions. En 2021, la société de Cupertino avait notamment mis un terme à sa pratique d’anti-steering pour les services dite de “lecture”, comme Netflix et Spotify. Mais ses nouvelles règles interdisent encore de mentionner le prix proposé hors de leur application mobile – et donc de mettre en avant de potentielles économies. Ce changement avait été précipité par une enquête des autorités japonaises de la concurrence, conclue sur un accord à l’amiable, qui avait été étendu aux autres marchés. Spotify n’a cependant jamais profité de cette nouvelle possibilité, au contraire de Netflix: il est ainsi toujours impossible de souscrire à son offre Premium depuis un iPhone ou un iPad.

Et maintenant, le DMA – L’annonce de la Commission intervient seulement deux jours avant l’entrée en vigueur du Digital Markets Act, une nouvelle réglementation européenne qui vise à renforcer la concurrence dans le numérique. Sur le papier, celle-ci doit représenter un big bang dans la distribution des applications mobiles, mettant fin au monopole d’Apple sur son système iOS. Elle interdira aussi les dispositifs anti-steering et permettra d’utiliser d’autres systèmes de paiement. Mais les changements proposés fin janvier par le groupe, afin de se mettre en conformité, sont déjà fortement critiqués. Ils visent en effet à préserver au maximum le statu quo, qui lui permet d’engranger des milliards d’euros de profits chaque année. Vendredi, Spotify et ses alliés ont ainsi adressé un courrier à Bruxelles pour lui demander de sévir.

Pour aller plus loin:
– Comment Apple veut contrecarrer le DMA européen
– Face à Apple, Epic Games va de nouveau saisir la justice américaine


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