Par , publié le 12 mars 2025

Un an après son entrée en vigueur, le Digital Markets Act va entrer dans une deuxième phase, celle des sanctions. Mais la Commission européenne ne devrait pas taper aussi fort que lui permet ce nouveau cadre réglementaire visant à renforcer la concurrence dans le numérique. Selon l’agence Reuters, elle ne devrait ainsi infliger que des amendes “modestes” à Apple et Meta. Très loin donc de la pénalité maximale, qui peut atteindre 10% du chiffre d’affaires mondial. Ce choix, qui n’est pas encore définitivement entériné, pourrait être interprété comme une volonté de ne pas accentuer les tensions avec l’administration Trump, qui se plaint des sanctions européennes. Bruxelles préfère mettre en avant la volonté de coopérer avec les entreprises, pour les pousser à changer leurs pratiques plutôt que de se lancer dans une bataille judiciaire.

Tester les limites – Le DMA marque une rupture historique pour les autorités antitrust, essayant d’agir a priori, plutôt qu’a posteriori pour lutter contre des pratiques anticoncurrentielles. Le texte concerne seulement sept géants du numérique, baptisés “contrôleurs d’accès”. Et seulement 24 de leurs services, comptant plus de 45 millions d’utilisateurs mensuels sur le continent. Cependant, il ne fixe que de grands principes, sans mentionner de règles précises. Il laisse ainsi une marge de manœuvre aux entreprises pour décider des mesures à mettre en place. Logiquement, celles-ci ont cherché à ne modifier que le strict nécessaire pour tenter d’atténuer l’impact sur leurs activités, quitte à multiplier ensuite les concessions. Elles testent ainsi les limites de la réglementation, mais aussi la détermination de Bruxelles à faire appliquer le DMA.

Procédures – Depuis un an, la Commission a lancé plusieurs procédures contre les “contrôleurs d’accès” afin d’évaluer leur mise en conformité avec le DMA. Meta pourrait être sanctionné pour ne pas demander l’autorisation de ses utilisateurs avant de partager leurs données personnelles entre ses applications – seules les personnes qui souscrivent à un abonnement peuvent s’y opposer. Apple pourrait l’être pour les restrictions imposées aux applications souhaitant rediriger vers leur site Internet pour réaliser un achat. Le groupe à la pomme risque une deuxième amende, sur un dossier encore plus explosif: les boutiques tierces d’applications. Par ailleurs, Bruxelles soupçonne Google d’accorder un traitement préférentiel à ses propres services sur son moteur de recherche. Et Amazon de favoriser les produits qu’il vend lui-même sur sa marketplace.

“Amendes massives” – Pour Bruxelles, ces potentielles amendes ne sont pas une finalité. L’objectif ambitieux du DMA est en effet de rééquilibrer la balance compétitive. Pour le moment, l’impact reste minime. Sur iOS, l’instauration d’un écran de sélection a certes permis aux petits navigateurs de gagner des nouveaux adeptes – en France, Firefox a doublé son nombre d’utilisateurs. Mais Safari d’Apple reste ultra-dominant. Toujours sur iOS, des boutiques alternatives d’applications ont bien vu le jour… quasiment dans l’anonymat. “Il reste encore du travail pour assurer une concurrence équitable”, souligne Kush Amlani, directeur de la réglementation chez Mozilla, l’éditeur de Firefox. Pour Tim Sweeney, le patron d’Epic Games, qui développe le jeu Fortnite, “seules des amendes massives” peuvent pousser les géants de la tech à respecter le DMA.

Pour aller plus loin:
– Mark Zuckerberg demande l’aide de Donald Trump contre l’Europe
– À Bruxelles, Henna Virkkunen reprend les rênes du DMA et du DSA


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