Lancé dans une grossière opération de communication pour séduire Donald Trump et ses partisans, Mark Zuckerberg s’est rendu en fin de semaine dernière chez leur podcasteur préféré, le très controversé et très écouté Joe Rogan. Au cours d’un entretien fleuve, le patron de Meta s’est indigné contre la censure “digne de 1984” menée par l’administration Biden, notamment sur les vaccins anti-Covid. Il a appelé à insuffler de nouveau de “l’énergie masculine” au sein d’entreprises “castrées” par les politiques d’inclusion et de diversité – que sa société vient d’ailleurs d’interrompre. Et il a aussi laissé entrevoir une autre raison de sa nouvelle allégeance au futur président des États-Unis: l’espoir que celui-ci fasse pression sur l’Europe pour qu’elle arrête d’infliger des amendes aux groupes technologiques américains… dont Meta.
2,5 milliards de dollars – La maison mère de Facebook, d’Instagram et de WhatsApp n’a pas été épargnée par les régulateurs européens. En particulier dans le cadre du Règlement général sur la protection des données (RGPD). Elle a été visée à cinq reprises par la DPC, la Cnil irlandaise, le plus souvent sous l’impulsion de ses homologues européennes, beaucoup moins conciliantes avec les pratiques de l’entreprise. Montant des amendes: 2,5 milliards d’euros. Et elle risque de nouvelles sanctions parce qu’elle cherche toujours à contourner l’obligation de recueillir le consentement de ses utilisateurs avant d’utiliser leurs données à des fins publicitaires. En novembre, Bruxelles lui a aussi infligé une amende de 800 millions d’euros, estimant que Facebook avait abusé de sa position dominante dans le domaine des petites annonces.
Pas que Meta – Outre le réseau social, Google a été condamné à payer huit milliards d’euros par la Commission européenne dans trois affaires pour des pratiques jugées anticoncurrentielles. L’an passé, une sanction de deux milliards d’euros a été prononcée contre Apple, dans son conflit avec Spotify. Microsoft, Intel ou encore Qualcomm ont également reçu des pénalités financières. Sans compter les demandes de remboursement des avantages fiscaux obtenus par Apple en Irlande et Amazon au Luxembourg. Pour Mark Zuckerberg, ces sanctions à répétition – qu’il chiffre à 30 milliards de dollars en 20 ans – sont “presque comme des droits de douane” imposés aux grands groupes technologiques américains. Il regrette que l’administration Biden n’ait rien fait pour “mettre la pression”, laissant l’Union européenne “faire tout qu’elle voulait”.
DMA et DSA – Le milliardaire reproche aussi aux États-Unis d’avoir montré la voie, en lançant des enquêtes antitrust contre Meta, Google, Apple et Amazon. Il se dit désormais “optimiste” avec l’arrivée de Donald Trump, qui “veut juste que les États-Unis triomphent”, tout en oubliant de rappeler que son administration est à l’origine des procédures qu’il dénonce. Son appel intervient alors que deux réglementations majeures viennent d’entrer en vigueur en Europe. D’abord, le Digital Services Act, qui impose notamment une meilleure modération des réseaux sociaux. X pourrait rapidement être sanctionné. En décidant d’alléger la modération, Meta pourrait se retrouver aussi dans le collimateur. Ensuite, le Digital Markets Act, qui vise à renforcer la concurrence dans le numérique. Et qui cible donc principalement les géants américains.
Pour aller plus loin:
– Comme X, Meta allège la modération pour “restaurer” la liberté d’expression
– À Bruxelles, Henna Virkkunen reprend les rênes du DMA et du DSA