L’issue ne faisait guère de doute. Devant la réticence des autorités de la concurrence, Nvidia a officiellement renoncé mardi au rachat d’Arm Holdings, le groupe britannique dont l’architecture est utilisée par quasiment tous les fabricants de puces. Si le géant américain des processeurs graphiques n’avait cessé de se montrer optimiste depuis l’annonce de cette opération record en septembre 2020, les obstacles étaient devenus beaucoup trop nombreux. Fin novembre, le gendarme américain de la concurrence avait lancé une procédure en justice pour bloquer cette acquisition. Et des enquêtes étaient également en cours à Bruxelles et à Londres.
Architecture archi-dominante – L’inquiétude des régulateurs s’expliquait par le rôle central joué par Arm. La société est spécialisée dans les systèmes sur puce (SoC), des circuits intégrés qui rassemblent différents éléments (processeur central, processeur graphique, puce Wifi…). Mais elle ne fabrique rien: elle vend des licences sur ses technologies. Apple, Qualcomm, Samsung ou encore Nvidia utilisent son architecture. En quelques années, celle-ci est devenue archi-dominante sur le marché des smartphones et tablettes, en particulier grâce à sa faible consommation d’énergie. L’essor attendu de la 5G et de l’Internet des objets doit encore renforcer sa position prépondérante.
Accès équitable – En tombant dans l’escarcelle de Nvidia, Arm aurait pu perdre son statut d’acteur neutre, ne discriminant aucun fabricant de semi-conducteurs. Des craintes qui ont été exprimées par plusieurs de ses clients. Devant les autorités de la concurrence, Nvidia s’était bien engagé à leur garantir un accès équitable aux technologies du groupe britannique. Sans convaincre. L’opération faisait peser un autre risque: elle aurait pu permettre au géant américain de se retrouver en position de force pour gagner de nouveaux marchés, comme les data centers et l’automobile. En Chine, le gouvernement ne souhaitait, par ailleurs, pas voir l’architecture Arm passer sous pavillon américain.
Introduction en Bourse – L’abandon du projet n’est pas seulement un échec pour Nvidia. C’est également un échec pour Softbank, qui avait racheté Arm pour 31 milliards de dollars en 2016. Le conglomérat japonais souhaite toujours se séparer de la société. Faute d’acheteur capable de payer le prix demandé et d’obtenir l’aval des régulateurs, la seule alternative reste une introduction en Bourse. Celle-ci devrait se tenir au cours de la prochaine année fiscale, qui se terminera fin mars 2023, très probablement à Wall Street. Softbank estime pouvoir obtenir un prix similaire à l’offre, en partie en actions, de Nvidia, dont le montant se chiffrait avant son abandon à 66 milliards de dollars.
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