Par , publié le 21 mars 2023

Touchée mais pas coulée. Lundi, Margrethe Vestager a promis de ne pas baisser les bras face aux avantages fiscaux accordés par certains gouvernements aux multinationales, et en particulier aux géants technologiques américains. “Des enquêtes importantes sont en cours et d’autres devraient être lancées dans un futur proche”, a assuré la Commissaire à la concurrence, désavouée à plusieurs reprises par la justice. En 2020, le Tribunal de l’Union européenne avait notamment annulé la sanction de 13 milliards d’euros infligée à Apple. L’année suivante, il avait aussi annulé la sanction de 250 millions d’euros imposée à Amazon. Bruxelles a depuis fait appel de ces décisions défavorables devant la Cour de justice de l’UE, la plus haute juridiction des Vingt-Sept.

Aides illégales – Ces déclarations interviennent à un moment crucial pour Margrethe Vestager. La semaine dernière, la CJUE a en effet entendu les arguments des deux camps dans le dossier Amazon. L’affaire Apple sera, elle, examinée fin mai. Dans les deux cas, la Commission européenne assure que les sociétés ont négocié un traitement fiscal favorable, respectivement au Luxembourg et en Irlande, où sont basés leurs bureaux européens. Grâce à ces arrangements, Amazon et Apple ont ainsi quasiment échappé à l’impôt pendant plusieurs années sur leurs profits réalisés en Europe. Pour Bruxelles, cela représente des “aides d’État illégales”. Et nécessite donc un remboursement des sommes économisées aux gouvernements luxembourgeois et irlandais.

Distorsion de concurrence – Les conclusions de la Commission ont été, bien entendu, rejetées par les deux géants américains, qui assurent payer tous les impôts qu’ils doivent. Mais aussi par le Luxembourg et l’Irlande, qui ne souhaitent pas remettre en cause leur fiscalité accommodante qui leur permet d’attirer des multinationales. Pour tenir juridiquement, l’argumentaire de l’exécutif européen doit démontrer que les avantages fiscaux représentent une distorsion de concurrence par rapport aux entreprises qui n’en bénéficient pas. Ce qu’il n’a pas réussi à faire selon le Tribunal de l’Union européenne. Le verdict de la CJUE est attendu au cours des prochains mois. En novembre dernier, elle avait déjà désavoué Bruxelles sur un dossier similaire concernant Fiat.

Taxe Gafa – L’enjeu est important pour Margrethe Vestager: de nouvelles défaites judiciaires affaibliraient encore davantage son offensive. Au contraire, des victoires pourraient faire changer ces pratiques. Au-delà, ces affaires symbolisent la difficile taxation des géants du numérique. Plusieurs pays européens ont riposté en imposant une taxe sur les services numériques, dite taxe Gafa, calculée sur le chiffre d’affaires et non plus sur les profits, souvent transférés vers des pays à faible imposition. Si cet impôt rapporte gros, il est en réalité indolore pour ces sociétés, qui le répercutent sur leurs clients. L’an passé, l’Europe et les États-Unis ont cependant trouvé un compromis sur les règles d’imposition des multinationales, prévoyant notamment de les taxer là où elles réalisent leurs ventes.

Pour aller plus loin:
– En Europe, la taxe Gafa rapporte gros mais n’impacte pas… les Gafa
– Taxe Gafa: l’Europe et les Etats-Unis trouvent un accord


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