Par , publié le 29 mai 2023

C’est une petite phrase qui en dit long. Derrière les grands discours sur la nécessité de réguler l’intelligence artificielle générative, Sam Altman a exprimé jeudi ses “nombreuses inquiétudes” sur le projet de règlement encore en discussion en Europe. “Les détails seront importants. Nous essayerons de respecter les règles mais si nous ne pouvons pas, nous cesserons d’opérer”, a expliqué le patron d’OpenAI, le concepteur du robot conversationnel ChatGPT, en tournée sur le continent. Des propos considérés comme une tentative de “chantage” par Thierry Breton, le commissaire européen au marché intérieur. Et qui ont poussé Sam Altman à rétropédaler dès le lendemain, assurant que la start-up américaine n’avait “bien entendu aucun projet de quitter” l’Europe.

Peser sur la régulation – Véritable menace ou simple erreur d’interprétation, la déclaration de Sam Altman contraste avec son audition mi-mai devant le Sénat américain. Le dirigeant y avait exposé ses craintes en cas de développement non maîtrisé de cette technologie, dont les progrès rapides sont illustrés par ChatGPT ou encore le générateur d’images Midjourney. Il avait aussi réclamé l’aide des gouvernements, estimant que leur rôle devait être “essentiel” pour limiter les risques. Son double discours témoigne cependant d’une réalité: si le responsable d’OpenAI milite pour l’instauration d’un cadre réglementaire sur l’IA générative, c’est avant tout pour peser sur les futures mesures qui seront adoptées. Et ainsi tenter d’en limiter leur portée, voire d’en profiter.

Licences – Sam Altman multiplie ainsi les propositions. Il s’est prononcé pour un système de licence, délivrée aux entreprises développant des modèles sophistiqués d’IA. Une idée, depuis reprise par Microsoft, le premier actionnaire d’OpenAI, qui pourrait handicaper les petites start-up et surtout les projets open source, concurrents potentiels du créateur de ChatGPT. Sam Altman propose aussi de créer une autorité internationale, “capable d’inspecter les systèmes, d’exiger des audits, de tester la conformité et d’imposer des restrictions”. Mais il milite pour que ce régulateur ne se penche que sur les prochains services d’IA. Et pas sur les modèles actuels, qui présentent selon lui des “risques comparables” à Internet et qui font déjà l’objet d’une réponse “appropriée” par la société.

“Surréglementation” européenne – Pour Sam Altman, en revanche, la version actuelle du projet d’encadrement européen reviendrait à “surréglementer”. Connu sous le nom d’AI Act, ce texte a été présenté en 2021. Mais il a dû être modifié pour introduire de nouvelles mesures liées à l’émergence des IA génératives. Les parlementaires ont récemment trouvé un accord. Ils proposent notamment l’obligation de déclarer si des textes, des images ou des musiques protégés par le droit d’auteur ont été utilisés pour entraîner les modèles d’IA. Ce qui pourrait permettre aux détenteurs de droits de saisir la justice pour tenter d’être rémunérés pour les contenus utilisés sans leur consentement. Le projet doit encore être examiné par la Commission et le Conseil. Son adoption est espérée avant la fin de l’année.

Pour aller plus loin:
– ChatGPT fait perdre plus de 500 millions de dollars à OpenAI
– Elon Musk lance une start-up d’IA pour concurrencer OpenAI


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