Par , publié le 20 juin 2023

Intel se savait en position de force. Et une visite de son directeur général Pat Gelsinger à Berlin lui a permis d’obtenir, partiellement, gain de cause. Lundi, le fabricant américain de semi-conducteurs a signé un nouvel accord avec le gouvernement allemand sur la construction d’une méga-usine à Magdebourg, dans l’est du pays, lui permettant de bénéficier de dix milliards d’euros d’aides publiques. C’est trois milliards de plus qu’initialement prévu l’an passé. Depuis, soulignait la société, “les perturbations de l’économie mondiale ont provoqué une hausse des coûts, de la construction à l’énergie”. Le montant de l’investissement ne sera plus de 17 milliards d’euros, assurait-elle, mais de 30 milliards. De quoi justifier une demande de rallonge.

Travaux repoussés – Il y a dix jours, le ministre allemand des Finances avait pourtant assuré que cette requête ne serait pas acceptée. Mais Intel a su tirer profit des dissensions au sein de la coalition gouvernementale, alors que le chancelier Olaf Scholz était, lui, favorable à de nouvelles aides. Le groupe avait aussi mis la pression en repoussant le début des travaux de son usine, qui doit créer à terme 3.000 emplois directs. Cette tactique avait déjà été employée avec succès dans l’Ohio, aux Etats-Unis. Intel n’a cependant pas obtenu tout ce qu’il voulait. Il réclamait en effet cinq milliards d’euros, afin que les financements publics représentent toujours 40% du budget. En outre, une partie des trois milliards d’euros supplémentaires prendra la forme de prix plafonnés de l’énergie.

Aides indispensables ? – L’usine de Magdebourg s’inscrit dans un vaste projet d’investissements d’Intel, qui promet de dépenser 80 milliards d’euros en dix ans sur le continent. Dès le départ, l’Allemagne faisait office de favorite pour l’accueillir. Le pays présente de sérieux atouts: une expertise dans la production de semi-conducteurs, un réseau de sous-traitants déjà bien établi et la proximité d’importants clients, comme ses constructeurs automobiles. D’ailleurs, le géant taïwanais TSMC réfléchit à implanter sa première usine européenne outre-Rhin. Cela n’avait pas empêché Pat Gelsinger de courtiser aussi la France pour faire monter les enchères, assurant que les aides sont indispensables pour rivaliser avec les usines taïwanaises et coréennes, qui affichent des coûts de production plus faibles.

Plan européen – S’il a fait plier Berlin, le fabricant négocie toujours avec le nouveau gouvernement italien pour obtenir davantage de subventions pour bâtir une usine d’assemblage dans la région de Venise. Comme ses rivaux, Intel se trouve en position de force, alors que l’Europe et les États-Unis souhaitent doper leur production de puces, pour le moment essentiellement fabriquées en Asie. L’an passé, la Commission européenne a dévoilé un important plan d’investissements, incluant une enveloppe de 30 milliards d’euros de subventions. Face à la concurrence américaine, Bruxelles a aussi accepté de déroger aux règles sur les financements publics. En échange, tous les fabricants aidés devront accepter de réserver, en cas de pénurie, une partie de leurs puces à leurs clients européens.

Pour aller plus loin:
– La France accorde 3 milliards d’euros de subventions pour une usine de puces
– Intel plombé par le plongeon historique du marché du PC


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