Par , publié le 16 octobre 2023

Ce n’est pas encore tout à fait la fin du feuilleton. Mais le rachat d’Activision Blizzard par Microsoft, pour 69 milliards de dollars, a été finalisé vendredi, près de deux ans après son annonce. Quelques heures plus tôt, la Competition and Markets Authority britannique (CMA) avait donné son feu vert à cette acquisition, la plus importante de l’histoire du concepteur de Windows. Pour mettre la main sur l’un des plus grands éditeurs de jeux vidéo, celui-ci a dû persévérer. Et mettre en place une stratégie très agressive, multipliant les accords commerciaux avec d’autres entreprises et n’hésitant pas à attaquer frontalement les autorités antitrust. L’opération reste contestée aux États-Unis, où la Federal Trade Commission (FTC) ne désespère toujours pas de la remettre en cause, malgré une première défaite judiciaire en août.

La FTC poussée à la faute – Il y a six mois, pourtant, le rachat d’Activision semblait se diriger vers un échec retentissant. À l’époque, le gendarme britannique de la concurrence venait de s’y opposer. Il avait estimé que Microsoft pourrait se retrouver en position dominante sur le marché du cloud gaming, notamment en s’emparant de la franchise à succès Call of Duty. Très compliqué, le processus d’appel au Royaume-Uni sourit rarement aux entreprises ciblées par la CMA. Au lieu d’abandonner, le géant de Redmond a alors joué son va-tout: il a habilement manœuvré pour pousser la FTC à demander une injonction devant un tribunal fédéral américain, jugé plus favorable, plutôt que d’attendre le verdict de son tribunal interne. Un pari gagnant: début juillet, la justice américaine donne raison à Microsoft. Un tournant décisif.

Concessions – Entre-temps, Microsoft a également réussi à convaincre la Commission européenne. Dans les deux cas, la société a mis en avant les contrats signés avec plusieurs de ses concurrents. Elle s’est notamment engagée à publier les prochains Call of Duty sur les consoles de Nintendo pendant dix ans. Et à rendre accessible le catalogue d’Activision sur l’offre de cloud gaming de Nvidia, qui était avant cet accord l’un des principaux opposants à l’opération, avec Sony. En quelques mois, ces concessions ont ainsi permis à Microsoft de fédérer quasiment l’ensemble de l’industrie derrière son projet de rachat, désormais présenté comme bénéfique pour tous. Ses dirigeants ont même réussi à obtenir le soutien du principal syndicat américain du secteur, leur promettant de pouvoir créer des syndicats chez Activision.

Brad Smith à la baguette – Ne restait alors plus que la CMA à convaincre. Une CMA encore plus isolée en juillet, quand Sony signe finalement un accord avec Microsoft. Face au gendarme britannique, Microsoft va multiplier les messages virulents, sous la houlette notamment de son président Brad Smith. “Les tactiques employées par Microsoft ne sont en aucun cas un moyen de s’engager avec la CMA”, dénonce Sarah Cardell, sa patronne. Mais la stratégie fonctionne. Début août, le régulateur accepte de rouvrir le dossier – une décision extrêmement rare. Microsoft fait alors une dernière concession, cédant les droits des jeux Activision dans le cloud à l’éditeur français Ubisoft. Désormais officiel le rachat peut encore, théoriquement, être défait par la FTC. Mais ses chances de réussite apparaissent désormais très faibles.

Pour aller plus loin:
– Comment la CMA est devenue la nouvelle bête noire des géants de la tech
– Accusé de position dominante dans le cloud, Microsoft promet des concessions


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