Par , publié le 17 janvier 2024

C’est la fin d’un feuilleton judiciaire qui aura duré trois ans et demi. Mardi, la Cour suprême des États-Unis, la plus haute juridiction du pays, a décidé de ne pas se saisir de l’affaire opposant Apple à Epic Games, le développeur du populaire jeu Fortnite. Cela signifie que le verdict rendu l’an passé par la justice américaine, et contesté par les deux entreprises, est désormais entériné. Si celui-ci est globalement favorable au groupe à la pomme, la Cour d’appel de San Francisco avait également confirmé les modifications, imposées en première instance, des règles de l’App Store, sa très lucrative boutique d’applications mobiles. Apple va ainsi être contraint d’autoriser les développeurs à ne pas utiliser son système de paiement. Et donc potentiellement à ne plus payer des commissions sur les abonnements ou les achats intégrés.

Système de paiement – Epic avait attaqué Apple en justice en août 2020, après le retrait de Fortnite de l’App Store. L’éditeur dénonçait des “pratiques anticoncurrentielles et monopolistiques”. Non seulement, soulignait-il, il est impossible de télécharger des applications sur iPhone et iPad sans passer par la boutique d’Apple. Mais il est aussi obligatoire d’utiliser son système de paiement, se traduisant par une commission comprise entre 15% et 30% sur chaque achat. Apple assurait qu’il ne peut pas être considéré comme un monopole: le marché des smartphones est dominé par Google et les adeptes de Fortnite peuvent y jouer sur d’autres plateformes. Et la société justifiait l’interdiction d’autres boutiques par la volonté de créer “un environnement sûr et sécurisé” pour ses utilisateurs.

“Liens externes” – À deux reprises, la justice a considéré que la position d’Apple ne constitue pas un monopole. Les juges ne l’ont ainsi pas obligé à ouvrir son système iOS à d’autres boutiques. Ni à autoriser les systèmes de paiement alternatifs directement dans les applications. Ils avaient simplement remis en cause la pratique dite d’anti-steering, qui interdit – sauf pour les applications de “lecture”, comme Netflix et Spotify –, de rediriger les utilisateurs vers un site Internet pour réaliser un achat ou souscrire à un abonnement. Aux États-Unis, les développeurs seront donc désormais autorisés à ajouter des “boutons” et “liens externes”. Mais la mise en œuvre de cette mesure reste incertaine car la justice n’a pas établi de règles détaillées, ni précisé si Apple pouvait encore prélever des commissions sur les achats externes.

Procédure antitrust – Ces deux points pourraient donc faire l’objet de nouvelles procédures judiciaires. Si le concepteur de l’iPhone peut maintenir un niveau de commissions proche de l’ancien – comme il a réussi à le faire en Corée du Sud et aux Pays-Bas –, l’impact sera probablement minime. L’intérêt des transactions externes sera en effet limité, car elles seront plus fastidieuses pour les acheteurs et plus complexes pour les développeurs. En revanche, Apple pourrait perdre des milliards s’il doit renoncer aux commissions: les achats externes offriront probablement des prix plus bas, tout en permettant aux éditeurs d’applications de gagner davantage. S’il a évité le pire, le groupe n’est pas encore à l’abri alors que le département de la Justice s’apprête, selon le New York Times, à déclencher une procédure antitrust.

Pour aller plus loin:
– Face à Epic, Google concède une défaite judiciaire retentissante
– Comment Apple tente d’échapper au DMA européen


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