Par , publié le 27 février 2024

Il y a tout juste cinq mois, Mistral AI vantait encore les mérites de l’open source. Lundi, pourtant, la start-up française spécialisée dans l’intelligence artificielle générative a fait volte-face: son dernier grand modèle de langage est propriétaire. Autrement dit, il n’est pas accessible gratuitement à tous ceux qui souhaitent l’intégrer dans un service ou une application. Il faudra désormais passer par des offres payantes, soit directement auprès du groupe français, soit en utilisant Azure, la plateforme de cloud de Microsoft. Car, autre annonce fracassante, Mistral AI a noué un partenariat commercial avec le géant de Redmond, déjà lié à OpenAI, le concepteur de ChatGPT. Celui-ci inclut aussi un investissement, dont le montant n’a pas été indiqué, mais pas une prise de participation, précise Microsoft au Financial Times.

500 millions levés – Mistral a été lancée en avril par trois anciens chercheurs français de DeepMind et de FAIR, les réputés laboratoires de Google et Meta en IA. Depuis, la nouvelle vedette de la French Tech a levé près de 500 millions d’euros et atteint une valorisation de deux milliards de dollars – du jamais vu pour une entreprise aussi jeune en Europe. Cet envol s’explique en partie par son pari de l’open source, un choix à contre-courant de ses rivales. En septembre, lors du lancement de son premier grand modèle de langage, Mistral assurait alors que c’était le seul moyen de “créer une alternative crédible à l’oligopole émergent” composé des quelques géants américains du secteur. Et elle promettait de “réduire l’écart de performance” entre ses modèles libres et les modèles fermés commercialisés par OpenAI ou Google.

Changement rapide – Certes, Mistral Al avait, timidement, expliqué en novembre que certains de ses modèles seraient commerciaux. Mais elle se disait aussi “engagée en faveur de modèles ouverts” – une phrase qui a disparu ce lundi de son site Internet. Surtout, rien ne laissait présager que ce changement de paradigme interviendrait si tôt, même pas un an après sa création. Interrogé par Le Monde, son patron Arthur Mensch promet de ne pas abandonner l’open source. En attendant, son modèle le plus performant ne l’est pas. Baptisé Mistral Large, celui-ci est le deuxième modèle le plus puissant du marché, assure la start-up. Il est devancé de peu par GPT 4 d’OpenAI. Ces comparaisons sont cependant incomplètes car elles n’incluent pas la version “turbo” de GPT 4. Ni la dernière itération du modèle Gemini, lancée début février par Google.

Rival de ChatGPT – Face à GPT 4, aussi accessible depuis l’offre Azure, Mistral aura fort à faire pour séduire les entreprises. Pour compenser des performances moins poussées, la start-up française mise sur des tarifs inférieurs de 20% à ceux pratiqués par sa rivale américaine. Elle souhaite aussi s’attaquer à son déficit d’image de marque auprès du plus grand nombre, quand OpenAI bénéficie du succès spectaculaire de ChatGPT. Pour tenter de combler cet écart, elle vient ainsi de lancer son propre robot conversationnel, baptisé Le Chat et disponible gratuitement, pour le moment du moins. “Le Chat est une démonstration”, explique Arthur Mensch au Monde. En rejoignant Azure, Mistral espère doper l’adoption de ses modèles. Et donc multiplier son chiffre d’affaires, première étape pour voir encore plus haut.

Pour aller plus loin:
– Après l’euphorie, les craintes d’une bulle autour de l’IA générative
– Les coûts de l’intelligence artificielle menacent de freiner son adoption


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