Par , publié le 29 février 2024

Dans le petit monde des agrégateurs Amazon, Thrasio a longtemps été l’exemple à suivre. “Le plus gros, le plus rapide et le mieux financé”, rappelle Juozas Kaziukenas, directeur du cabinet Marketplace Pulse. Mercredi, pourtant, la start-up américaine s’est placée sous la protection du Chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites – une procédure qui va lui permettre de réduire sa dette, une condition indispensable pour espérer survivre. À peine deux ans après avoir levé plus de 3 milliards de dollars, lui permettant de racheter environ 200 petites marques indépendantes qui cartonnaient alors sur les places de marché, les fameuses marketplaces popularisées par Amazon. Elle a été rattrapée par le ralentissement de la croissance des ventes en ligne, que ses dirigeants n’avaient pas anticipé. Et par son endettement.

Nouvelles marques – Dans le sillage de Thrasio, une centaine d’agrégateurs, essentiellement américains, ont vu le jour. Ils ont surfé sur l’essor, encore accentué par la crise sanitaire, des marketplaces, qui permettent à des marchands tiers de vendre sur des sites d’e-commerce. Et qui ont fait émerger de nouvelles marques court-circuitant les réseaux traditionnels de distribution. La stratégie des agrégateurs consiste à racheter celles qui réalisent déjà plus d’un million de dollars de chiffre d’affaires, mais qui n’ont pas les ressources suffisantes pour continuer de croître. Ils peuvent ensuite optimiser le référencement et le marketing, augmenter les dépenses publicitaires ou encore accélérer la distribution, par exemple en lançant des plateformes de vente directe ou en rejoignant de grandes enseignes physiques.

15 milliards levés – Portés par l’euphorie post-Covid, les agrégateurs attirent alors les investisseurs. Entre 2021 et 2022, ils lèvent plus de 15 milliards de dollars. Et les valorisations s’envolent: 5 milliards de dollars, par exemple, pour Thrasio. “La majorité des fonds récoltés était de la dette”, nuance Juozas Kaziukenas. Considérés comme indispensables à l’époque pour grossir le plus vite possible, ces emprunts se traduisent désormais par une importante charge financière. La situation est d’autant plus compliquée que les performances des marques rachetées ne sont souvent pas à la hauteur des espérances. Aveuglés par leurs moyens financiers et par la forte concurrence, les agrégateurs ont en effet signé des chèques trop élevés ou mis la main sur des marques présentant un faible potentiel de croissance.

Achats en pause – Le secteur est aussi handicapé par la rivalité croissante entre les vendeurs sur Amazon, qui rend quasiment obligatoire d’acheter de la publicité pour bien figurer dans les résultats de recherche. Selon les estimations de Marketplace Pulse, le géant du commerce en ligne récupère ainsi, en moyenne, plus de 50% du prix de vente. En outre, les agrégateurs ne peuvent plus compter sur un apport d’argent frais. L’an passé, ils ont levé moins de 200 millions de dollars. Dans ce contexte, la plupart ont réduit la voilure, licenciant en partie de leurs effectifs et mettant les acquisitions en pause. “Ils sont devenus opérateurs”, souligne Juozas Kaziukenas, se focalisant davantage sur les marques qu’ils ont déjà rachetées. Plus de 40 sociétés ont disparu ou ont été avalées. Et seulement une poignée sont devenues rentables.

Pour aller plus loin:
– Une deuxième vague de licenciements chez Amazon
– Shopify licencie et abandonne ses ambitions dans la logistique


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